Atelier du 12/10/19 : du salon à la salle de classe, étudier l’empire romain avec les jeux vidéos ?

Par William BROU

ESPE, 14h15-15h15

 

Professeur d’histoire et géographie  à Thiers, dans l’académie de Clermont-Ferrand, William BROU anime par ailleurs une chaîne You Tube, « Histoire en jeux » https://www.youtube.com/channel/UCRThjUeXnxL_BKUhqJv5XBg, sur laquelle vous pouvez visionner des vidéos qu’il a réalisées.

Le but de cet atelier est de présenter une pratique en classe de l’usage du jeu vidéo. Si cet usage lui semble pertinent, il insiste sur le fait que ce n’est pas une panacée et qu’utiliser les jeux vidéos en classe n’est pas miraculeux. Par ailleurs, ce n’est pas quelque chose de très compliqué et il ne faut pas redouter cette pratique, même si l’on est néophyte – comme moi d’ailleurs!

William BROU aborde le propos par quelques chiffres : plus de 2000 jeux vidéos s’intéressent à l’histoire dont 246 à l’Antiquité (contre 947 pour l’époque contemporaine avec une sur-représentation de la seconde guerre mondiale). On peut retrouver sur le site « Historia Game » un répertoire des jeux existants.

S’intéresser aux jeux vidéos en classe correspond aux attentes officielles : on peut ainsi travailler sur la maîtrise des outils numériques et des nouvelles technologies mais aussi aborder les langages. Dans les programmes, dès le CM1, l’Antiquité apparaît. En 6ème, on s’intéresse à la conquête romaine, à la paix romaine et à la romanisation de l’empire. En seconde, le terme d’ « empreintes » a retenu toute l’attention de l’enseignant.

La question que se pose William BROU est la suivante :

est-il possible de faire construire des connaissances historiques sur l’empire romain et la cité romaine aux élèves en utilisant le jeu vidéo ?

Il nous invite à découvrir Caesar III (1998), jeu disponible et gratuit que l’on peut facilement faire installer en collège / lycée. La bande annonce, qu’il nous fait découvrir, est déjà à analyser comme une série de clichés. Le but du jeu est simple : le joueur est un gouverneur que César envoie dans l’empire construire de nouvelles villes. William BROU nous fait une démonstration et met en évidence une mécanique de game play qui n’est pas fidèle à la réalité (on passe de la construction de maisons, à celle de villas puis de palais ; on peut créer plusieurs « colisées » ; la première denrée est le blé ; on débute en 350 avant J-C et c’est un empereur qui nous parle, etc). Ainsi, en plaçant les élèves en binômes, il met en place un travail d’ordre critique. Le professeur propose ainsi de leur faire comparer la cité de Caesar III à la cité de Rome. Une fiche d’activité est disponible dans les ressources « Clio-geek » sur le site des Clionautes.    https://www.clionautes.org/categorie/clio-geek

Dans un premier temps, sur un laps de temps de une à deux heures, les élèves vont jouer et noter par écrit les règles du jeu. Ensuite, après avoir effectué une sélection de ressources au CDI, ils vont mener l’enquête sur la cité romaine ce qui leur permettra, dans un troisième temps, de comparer. Ainsi, on questionne le modèle de l’Urbs ; les bâtiments romains représentés; la vie quotidienne; la construction de l’Empire (pour aboutir à l’idée qu’une Rome « colonisant » le monde est fausse). Dans le jeu, pas de distinctions régionales : vit-on de la même manière partout dans l’Empire ?

Si l’activité est difficile pour les élèves qui ne jouent pas dans leur quotidien à ce type de jeux, et quelque peu chronophage, elle permet de mettre en lumière notre représentation de Rome et de la romanisation, représentation erronée mais véhiculée par les arts (cinéma, jeux, etc).

 

D’autres exemples sont donnés comme Rome II : Total War dont le scénario peut être analysé pour aborder la conquête et la gestion des armées. Il est également possible de visionner en classe des passages d’Assassin’s Creed origin’s, notamment la mise en scène de l’assassinat de Pompée par Ptolémée XIII, le César séducteur de Cléopâtre et prêt à tout pour conquérir le pouvoir, la mort du dictateur. De même, Discovery Tour propose huit scénettes de Cléopâtre, dont une où la pose lascive de la reine peut être mise en relation avec les représentations picturales du XIXème siècle. William BROU cite également Civilization, Centurion, Great Conqueror Rome.

C’est dans un but critique que les jeux sont utilisés en classe : ces documents racontent quelque chose mais restent fictifs et ne s’attachent pas toujours à la réalité historique.

William BROU voit le jeu vidéo comme un outil au service des enseignants, mais qui ne saurait remplacer d’autres outils. L’intérêt est aussi de solliciter les intelligences multiples : intelligence verbo-linguistique = l’élève raconte ce qu’il a vu ; intelligence visuelle et spatiale = l’élève se repère dans le jeu, sur une carte ; intelligence interpersonnelle = travail en groupes sur le jeu ; intelligence intrapersonnelle = émettre des hypothèses et les vérifier par un travail critique, etc.

 

Pour conclure, William BROU montre que le jeu vidéo contribue à la construction d’une culture et s’y confronter éveille l’esprit critique des élèves. Cela permet d’apprendre en histoire différemment, en modifiant l’usage du document historique, de la source et de mobiliser plusieurs compétences.