Les 23, 24 et 25 septembre, a eu lieu la première Game Jam des Rendez-vous de l’Histoire. Une première dans l’Histoire de ce festival incontournable pour les historiens, les amateurs d’Histoire et évidemment pour les professeurs d’Histoire-Géographie.

Deux mois après, je vous propose un petit retour sur cet événement dont les Clionautes ont été l’une des chevilles ouvrières.

Si vous ne savez pas ce qu’est une game jam, je vous invite à lire cet article avant toute chose.

 

Une game jam ou un espace de rencontre entre la recherche et les jeux vidéo

La Game Jam met en compétition neuf jeux basés sur des thèses de jeunes chercheurs.

Parmi ces derniers, certains  avaient déjà un pied dans le monde du jeu vidéo comme Etienne Maignan (qui fabrique ces propres jeux), Sébastien Verney (animateur d’une chaine Youtube d’analyse de jeux vidéo historiques), Pierre Le Mouel et Aurore Brouet (qui ont déjà participé à la précédente Jam).

D’autres ont sauté dans l’inconnu : Aude Péraud-Rousselet, Gwenaëlle Deborde, Raphaël Carbonne, Paul Mayens et Simon Moramarco.

Merci à tous ces doctorants ou jeunes docteurs audacieux !

Les jeunes chercheurs doivent en effet travailler avec les « jammeurs », c’est-à-dire des créateurs de jeux vidéos, pour adapter leur travail aux contraintes vidéoludiques. Tout doit être fait en un week-end !

Nous tenons à remercier les 58 jammeurs qui se sont inscrits et ont permis de donner vie aux idées des jeunes chercheurs.

C’était là un des challenges de cet événement : ouvrir un pont entre le monde des historiens et le monde des créateurs de jeux vidéo.

 

Neuf jeux vidéo sur l’Histoire

Neuf équipes se sont lancées et neuf jeux ont été produits. Il n’est pas rare lors d’un événement de ce genre de voir des abandons, mais là NON. Bravo aux équipes qui ont fourni un immense travail durant la jam !

A BIT too late : Vous avez été promu responsable du Bureau International du Travail en Afrique ! Envoyez des experts pour aider les pays à se développer.

Fortuna Maris : Dans « Fortuna maris » vous incarnez un marchand qui souhaite faire fructifier ses activités commerciales par le biais d’un navire emblématique de l’époque : la corbita.

Colonistrates : Dans Colonistrates, vous allez pouvoir créer un bâtiment à partir de différents éléments culturels, dans le contexte de l’Indochine coloniale. Le jeu vous permet de créer un bâtiment à partir d’éléments culturels divers. Le bâtiment est fictif et sert de métaphore mais le jeu s’inscrit dans le contexte de l’Indochine coloniale.

Le Roi a dit : Survivez au chaos des réformes du roi Henri VIII dans une succession effrénée de mini-jeux. Dans la peau d’un sujet du royaume d’Angleterre au XVIe siècle, faites l’expérience de revirements religieux incessants, qui risquent bien de mettre votre âme en péril !

Les Jeux Olympiques n’auront pas lieu : Incarnez Nelson, envoyé direct de Zeus, pour partir à la recherche de participants aux Jeux Olympiques, à travers différentes époques ! Voyagez de 776 av. J.-C. jusqu’en 1896 ! Rencontrez des personnages illustres de chaque époque ayant joué un rôle important lors des Jeux Olympiques, et tenter de les convaincre au travers de dialogues à choix.

Pour le Roy ? : Dans « Pour Le Roy ? » vous incarnez un ami de Regnault de Chartres, conseiller du roi Charles VII, et vous essayez de comprendre les relations qui existent entre les différents membres du Conseil. Vous vous intéressez tout particulièrement à Pierre de Giac, retrouvé dans un sac flottant dans l’Auron.

Madame Adelaïde : Le Roi Louis XV avait plusieurs filles. Très soudées, elles étaient pourtant la cible de gens malveillants de la Cour. L’une d’entre elles, Adélaïde, était la plus téméraire. Rebelle de l’époque moderne, elle ne se laissait pas marcher sur les pieds et n’hésitait pas à casser les codes.

Une histoire de(ux) nations : Chypre, c’est le soleil, la mer… et le sang. Voilà bientôt 50 ans qu’aucune solution n’est trouvée au conflit entre les nationalistes chypriotes grecs et les nationalistes chypriotes turcs. Un pays aux deux visages irréconciliables. Vous êtes un journaliste nationaliste et devrez rallier les membres de votre parti pour les mener vers la victoire.

Toutes les périodes historiques ont été représentées. On peut saluer aussi la grande diversité des thèmes abordés. On trouve autant de l’histoire économique (Fortuna Maris), de l’histoire politique (Pour le Roi, Ex Decreto, Une histoire de(ux) nation(s)), de l’histoire sociale (Le Roi a dit, A BIT too late, Madame Adelaïde) ou de l’histoire culturelle (Colonistrates, Les JO n’auront pas lieu).

Quatre jeux récompensés par un jury d’experts

Un jury d’experts réunissant les différents mondes gravitant autour du jeu vidéo et de l’Histoire, ont évalué les jeux sur trois critères :

  • Historique : Le jeu contenait-il des connaissances historiques ?
  • Pédagogique : Construire un jeu avec des connaissances historiques est une chose, réussir à les faire passer aux joueurs en est une autre.
  • Ludique : Il s’agissait bien de faire des jeux vidéo en ne négligeant pas le fun…

Le jury a souhaité remettre 3 prix :

  • Mention spéciale attribuée à Colonistrates pour son gameplay maitrisé et permettant habilement de faire comprendre les problématiques liées au patrimoine en tant que porteur de syncrétismes culturels.
  • Mention spéciale attribuée à Pour le Roy ? pour son approche intéressante des réseaux d’influence et la mise en scène  dans lequel le joueur est plongé.

Ex Decreto a, quant à lui reçu le prix du public, récompensant ainsi le gros travail de l’équipe pour l’amélioration du jeu entre la Jam et le Festival.

Ex Decreto : Vous êtes gouverneur d’une province récemment conquise par Rome : la Dalmatie. Une partie de votre territoire reste particulièrement instable, vous devez régler rapidement la situation pour éviter un soulèvement. Rendez la justice de façon avisée afin de maintenir la paix et d’affirmer la domination romaine. Vous avez 5 jours.

Deux nouveaux espaces dans le Festival

Les habitués des lieux le savent, l’espace est une denrée rare durée les Rendez-vous. La ville de Blois est totalement occupée par l’Histoire. Trouver une place à un nouvel événement a été un gros challenge.

Il a été décidé que la Game Jam se déroulerait en distanciel sur un espace Gather Town. Solenne Marty a reproduit un monument emblématique de la ville : la halle aux grains.

Et puis, pendant les 3 jours de festival, les visiteurs ont pu découvrir ces neuf jeux à la Bibliothèque Abbé Grégoire. Des postes informatiques, des panneaux d’informations et un petit coin salon permettaient de découvrir les jeux dans un espace convivial.

Un succès critique et public

La Game Jam a clairement rencontré son public. Tout d’abord, plus de 150 personnes ont suivi les soirées d’ouverture et de clôture sur la chaine Twitch d’Histoire en jeux.

Sur place, plusieurs centaines personnes sont venus à notre rencontre dans la bibliothèque Abbé Grégoire. Ils sont volontairement ou parfois par pur hasard. Pour ces derniers, nous avons été heureux de voir leur ouverture d’esprit. Malgré leur manque d’appétence pour les jeux vidéo, elles ont pris le temps de nous écouter et se sont laissé aller à tester quelques jeux.

C’est cela aussi la Game jam, faire découvrir l’univers du jeu vidéo à des personnes qui n’y connaissent rien.

La presse s’est également largement fait l’écho de l’événement. La Jam a eu droit à deux articles sur le site web de France 3 (Article 1, Article 2), deux articles dans la Nouvelle République (Article 1, Article 2), et un article dans un média spécialisé (Gamekult).

Enfin, nous avons eu la chance de pouvoir présenter les jeux à des personnalités politiques et scientifiques de premier plan :

  • Jean-Noël Jeanneney, président du Conseil scientifique des RVH,
  • Jack Lang, président de l’IMA,
  • Xavier Mauduit, historien, animateur du Cours de l’Histoire sur France Culture
  • Julie Gayet, présidente du cycle cinéma lors du Festival.
Jean-Noël Jeanneney en pleine discussion avec des jammeurs

 

Parler d’Histoire à un public plus jeune

Organiser une Jam, la diffuser sur Twitch et rendre accessible les jeux créés permet d’attirer les plus jeunesMême si la moyenne d’âge des joueurs est 39 ans en France, moins présent durant le Festival.

À ce titre, nous avons eu l’opportunité de faire tester les jeux de la Jam à une classe de Première du lycée Dessaigne de Blois. Nous leur avons aussi proposé une conférence sur le rapport entre jeux vidéo et média.

Nous remercions vivement la direction de l’établissement de nous avoir accueilli et M. Jean-Luc Carl à l’origine de cette initiative.

Merci !

Il y a 5 ans, j’ai eu la chance de participer pour la première fois aux Rendez-vous en tant qu’auditeur. Je n’aurais pas imaginé y organiser un tel événement. Aujourd’hui, je me rends compte de la chance que j’ai. J’espère avoir encore l’occasion de servir la cause de l’Histoire et de sa diffusion au plus grand nombre !

Je remercie le Festival pour sa confiance, Pol Grasland-Mongrain pour avoir co-organisé avec moi. Je vous donne rendez-vous l’année prochaine pour une nouvelle édition !

En attendant, je vous invite vraiment à tester ces jeux qui ont été faits avec le cœur !

Si vous souhaitez en savoir plus sur ces jeux et pourquoi pas les utiliser en classe avec vos élèves, je vous invite vivement à vous rapprocher de moi : william.brou@clionautes.fr