exposition au palais du Tau à Reims
Contrairement à ce qu’on pensait jusqu’à aujourd’hui, l’arrière avait connaissance des horreurs de la guerre. Il n’y avait pas que la censure et le « bourrage de crâne ». Dans la presse illustrée française de l’époque, l’hebdomadaire Le Miroir se démarque pour peu à peu aboutir au réalisme de guerre. C’est l’objet de cette exposition au Palais du Tau à Reims.

L’exposition dans la salle basse du Palais du Tau à Reims raconte la naissance de la photographie de guerre à travers l’évolution de cet hebdomadaire entièrement illustré de photographies. Il passera de 300 000 lecteurs en 1914 à un million à la fin de la guerre.

L’exposition se présente selon 3 thèmes :


I) L’information photographique, de tatonnements en mutations.


1ere vitrine :

En 1914, Le Miroir ne parvient pas à publier des photos du front. On voit seulement l’arrière et des thèmes « politiquement corrects » : la mobilisation, les « chefs » : la guerre est racontée par le haut et les soldats sont absents.

2è vitrine :

1915 , Le Miroir lance un appel aux amateurs et des concours pour retrouver la guerre.
Dès le 16 août 1914 puis le 27 septembre , il clame qu’il paiera n’importe quel prix les documents photographiques, relatifs à la guerre, présentant un intérêt particulier

En mars 1915 il lance le concours de la plus saisissante photographie de la guerre qui sera récompensée d’un prix de 30 000 francs, chiffre énorme. Pour comparer, il est indiqué par exemple, le salaire d’un instituteur : 1600 francs annuels !
En mai 1915 un concours mensuel est instauré avec des prix de 1000, 500 et 250 francs. Des garanties sont demandées quant à la véracité documentaire.

II) Le Miroir reflet d’une culture de guerre à la française.

3è vitrine : Falsifications, optimisme épique et clichés pittoresques

Jusqu’en 1915 le « bourrage de crâne  » avait 2 objectifs :

1) diaboliser l’ennemi (avec des photos falsifiées)

2) colorer d’un ton optimisme toute information publiée : on voit des photos de soldats dans des situations de vie quotidienne « normale », aucun détail « insupportable » n’est montré.


4è vitrine :

A partir de 1915, un tournant est amorcé dans les représentations de l’héroïsme de guerre.
En 1915 et 1916 les photos montrent un réalisme nouveau : des soldats enmitouflés avec ce qu’ils peuvent faute d’uniformes corrects, les conditions d’hygiène terribles, les conditions d’alimentation. Le héros est devenu « Un poilu ».
En 1916, Le Miroir a abandonné toute idée d’optimisme.

5è vitrine : La ville de Reims et son «martyre»

Le Miroir présente les destructions de la cathédrale au fil des mois, avec un ton mélodramatique. S’en prendre à la cathédrale, c’est s’en prendre à l’âme française !

Le pays est montré comme détruit, mutilé, victime. Cette dominante victimaire dans les images du Miroir est l’un des traits spécifiques d’une culture de guerre à la française

6è vitrine : Les habitants de Reims «héros du quotidien à l’arrière»

Ils sont montrés comme des héros car ils restent, continuent leurs activités, tout en portant les masques à gaz ou en allant se réfugier dans les caves pendant les bombardements.

III 1915-1918 : dire autrement la guerre

7è vitrine : Brosser le décor de la guerre : les photographies du champ de bataille.

A partir de 1915 grâce aux concours le ton de l’hebdomadaire se modifie et adopte un discours photographique cohérent pour synthétiser chaque bataille. Deux batailles sont analysées dans cette vitrine :

– Verdun : les photos montrent une nature apocalyptique, symbole de la déshumanisation du conflit . On voit des forêts dévastées, des successsions de troncs mutilés, le sol lunaire, mais pas d’hommes.

– La Somme : Une gigantesque bataille poubelle. Les images montrent des tranchées encombrées de déchets divers, parfois humains. Les hommes sont réintégrés, parfois morts, mais le plus souvent acteurs de la bataille.
Pour les concepteurs de l’exposition, ces 2 batailles sont 2 modèles stéréotypés, proposés par l’hebdomadaire et difusés pendant des mois ils vont familiariser le public avec la guerre et sa violence nouvelle.

8è vitrine : Suivre la guerre en images : les photographies de combat.

– saisir la modernité de la guerre

On montre les progrès techniques : les canons en pleine action, l’intensité de la mitraille. Le Miroir réalise parfois un reportage quasi filmique, immergeant le lecteur dans l’espace du champ de bataille et dans le temps du bombardement.
Le lecteur partage les émotions, il est comme un soldat virtuel.

9è vitrine : Suivre la guerre en images : les photographies de combat.

– Accompagner les hommes dans la tourmente

Grâce aux documents envoyés par les soldats, le Miroir parvient à les représenter dans l’action, mais jamais au plus fort car l’opérateur doit choisir entre tirer ou photographier !

Les images de mort restent les plus recherchées par le Miroir et son public.

10è vitrine : Atteindre l’essence de la guerre : les photographies de morts.

– Mourir en grande guerre

Le Miroir au fur et à mesure que le temps passe montre des photographies de plus en plus terribles. Il stimule la chasse au sensationnel.
Des photos comme celle de 2 soldats morts (lun français, l’autre allemand) après leur corps à corps sont publiées, mais aussi des corps brûlés, des corps encastrés dans les parois de la tranchée.

La légende accentue les effets :«Des têtes, des bras, des jambes d’Allemands sortent des remparts de terre.»

On trouve aussi des photographies des hécatombes : des morts en masse, fauchés, entassés.

11è vitrine :
Le traitement des corps après la mort.

Ce sont les images les plus terribles. Elles rendent compte des différentes étapes qui succèdent à la bataille. elles sont ambivalentes : les corps ont une sépulture, mais pas tous ! Certains sont abandonnés, dévorés par les oiseaux de proie. le Miroir exhibe les aspects les plus insupportables imposant au lecteur une vision d’enfer de la «réalité» de la grande guerre.

En fin d’exposition une projection de nombreuses photographies permet de compléter ces analyses. Les photographies sont proposées selon 4 thèmes :

– Vivre en guerre, vivre la guerre.

– les représentations de «l’ennemi»

– la guerre du ciel

– l’esthétique de la guerre

Renseignements pratiques :


dates :
depuis le 8 février jusqu’au 8 avril 2007

lieu : au Palais du Tau (à côté de la cathédrale)

2 place du Cardinal Luçon

51 100 Reims

tel : 03 26 47 81 79

horaires : tous les jours sauf le lundi de 9h30 à 12h30 et de 14h à 17h30.

Un catalogue est vendu Images et violence 1914-1918. Quand le Miroir racontait la Grande Guerre.
. Il a été rédigé par Joëlle Beurier (auteure d’une thèse sur la Grande Guerre, matrice des médias modernes) et complète les analyses lues durant l’exposition.

Commentaire :

L’exposition est courte mais dense, la projection de nombreuses photos en fin de parcours permet une bonne assimilation des analyses qui sont souvent longues à lire.

Une exposition plutôt pour les lycéens.

Vu la courte durée de cette exposition j’ai été volontairement détaillée dans mon compte rendu !

Un questionnaire m’a été envoyé par le service pédagogique du Palais du Tau , je le rajoute ici le 21 mars 2007.

Questionnaire élèves
Questionnaire élèves