Parmi les nombreuses réactions qui ont été publiées sur la liste de diffusion professionnelle des historiens géographes.

Il y a notamment celle-ci: Patrick B. en est l’auteur.

«Face à ce qui s’est passé en ce jour, c’est toute la cohésion culturelle qui est la mienne, et pas seulement, qui vole en éclats.
Mon hispanité catholique, ma judéité séfarade, mon islam culturel, mon admiration pour les Lumières, tout est parti en fumée. Après l’Algérie, le Liban, je vois mes amis désemparés.
Où sont Darwich, Cossery, El Aswany, Mûnir Bachir, Abû Nûwas, Aaron Appelfeld, Amos Oz, Oum Khalsûm ? Où sont passés Spinoza, Erasme, Diderot, Benjamin et William Thoreau ?
Où Octavio Paz, Gabriel Garcia Marquez. Où Maïmonide et Averrhoès et Thomas d’Aquin ?
Un grand silence se répand sur notre humanité, toute notre humanité. A force de ravauder la philia et l’agapê, nous avons non pas aletheia, mais hybris, et les portes d’airain du royaume de Pluton, lorsqu’elle seront entrouvertes, ne nous permettrons plus de nous retourner vers la lumière.»

Il y en a eu d’autres; toutes traduisaient dans notre réseau le même sentiment de colère, d’indignation, mais aussi de détermination.

Il y a aussi cette réaction de Jean-Baptiste

«En tant que prof d’histoire-géo et d’éducation civique, je sais que le feu des questions des élèves va se focaliser sur moi demain, après qu’ils aient passé un mercredi après-midi à suivre les informations tragiques tombant les unes après les autres depuis 11h50 ce matin.»

Faut-il en rajouter ?

Je ne le pense pas. Au delà de l’émotion, lorsque la barbarie menace, il y a la lucidité, celle qui nous anime. Ne pas succomber au découragement, ce que nos concitoyens ont compris, ne pas tomber dans l’amalgame, surtout ne pas stigmatiser et continuer ce patient travail d’explication que nous menons, comme praticiens de l’histoire et de la géographie, comme professeurs d’éducation civique.

Alors oui, nous allons aujourd’hui, au delà des minutes de silence et des moments de recueillement, nous allons parler, expliquer, transmettre.

  • Parler de la laïcité, de la tolérance, du respect de l’autre.
  • Transmettre des valeurs, évoquer les libertés fondamentales, celle de la liberté de la presse, l’article XI de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen.La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi.
  • Parler aussi des lois de la République, appelées Loi de liberté, comme celle du 29 juillet 1881. http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000877119

C’est ce combat que nous poursuivons, même si une part de nous mêmes, lecteurs de Charlie Hebdo, et pour les plus anciens, de Hara Kiri, auditeurs et lecteurs de Bernard Maris, admirateurs de Cabu et de Wolinski qui nous ont accompagnés depuis le lycée pour certains d’entre nous, de Tignous et de Charb, est partie avec eux.

Nos pensées vont aussi vers les autres victimes, les deux serviteurs de l’État tombés dans l’accomplissement de leur mission, et tout ceux qui en ces instants tragiques sont tombés sous les balles des tueurs.

C’est une épreuve, ne nous en cachons pas. Le dernier attentat le plus meurtrier sur le sol français (28 victimes) était à imputer à des tueurs de l’OAS qui croyaient défendre l’occident chrétien.18 juin 1961 : Une bombe posée par l’OAS sous le train Strasbourg-Paris à la hauteur de Vitry le François fait 28 morts
Celui-ci semble lié au fondamentalisme qui détourne le message de paix et d’amour de l’un des grands monothéismes. Dans les deux cas les assassins affichent un mépris total de la vie humaine.

La réponse de la République est celle de la fermeté dans la défense de ses valeurs.
À nous, professeurs d’Éducation civique d’en être les transmetteurs.
C’est aussi une mission de combat.