Mylène Farmer, durer dans le temps, sans contrefaçon

Dans son étude intitulée Pop culture. Réflexions sur les industries du rêve et l’invention des identités parue en 2014, le philosophe Richard Mèmeteau explique que : « le tube n’est pas une recette mais une transformation » à travers lequel peuvent se rejouer des mythes universels accessibles et compréhensibles par un large public. Ce dernier est certes un consommateur mais il reste aussi, malgré la proposition de produits pop industrialisés et marketés, avide de sens et tend à se projeter plus facilement et à adhérer sur le long terme dans un univers, identifiable, cohérent et aussi référencé. À ce titre, Mylène Farmer, artiste française née au Canada que je ne vais pas présenter ici, est représentative de cette quête de sens chez le public, le sien étant particulièrement attentif aux paroles et aux références comme en témoigne le nombre impressionnant de publications dont elle fait l’objet depuis une vingtaine d’années. Leur contenu ne se limite pas à rapporter ses faits et gestes publics ni à résumer sa carrière, elles vont au-delà. En effet, la quête du sens et de la référence cachés via le symbole ou le mot utilisés, fait partie du jeu avec son public à chaque sortie d’album. Le prochain, prévu en fin d’année, ne dérogera pas à la règle.

Le souci de plaire et de divertir pourraient reposer sur une esthétique éphémère et des principes de standardisation issus de la société industrielle. Mais pour durer dans le temps, asseoir sa crédibilité, renouveler le public et, en parallèle le fidéliser, des références plus profondes demeurent nécessaires à l’artiste, obligé(e) de puiser dans un répertoire de références culturelles vastes et accessibles au plus grand nombre tout en y ajoutant ce que l’on appelle sa « patte ». L’histoire et ses références, au même titre que la littérature, est sollicitée. Combinées ensemble, elles sont un moyen pour l’artiste de se (re)situer dans le temps, dans son temps voire de créer un lien avec la culture passée et future, ce qui aboutit à la mise en place d’un univers personnel et artistique unique. L’histoire tout comme la littérature offre ces fameuses clés d’approches universellement partageables.

La carrière de Mylène Farmer qui a débuté en 1984, est, en général, plutôt associée à d’autres périodes de l’histoire que l’Antiquité tels que la guerre de sept ans, qui sert d’arrière-plan au clip de Pourvu qu’elles soient douces (Libertine II), la révolution russe de 1917 (Tristana) ou même la Shoah pour le clip Souviens-toi du jour  (1999) et le projet brièvement envisagé pour Sans Contrefaçon (1987).
Pour autant, l’Antiquité est bel et bien présente dans son œuvre, que ce soient dans les paroles mais aussi les clips et les concerts, de manière explicite mais surtout et avant tout par touches plus ou moins visibles, parfois subtiles. Ces dernières sont présentes le plus souvent dans un ensemble mélangeant les strates et références historiques sans pour autant les copier ouvertement ou grossièrement. En effet chez Mylène, on ne trouve pas de grosses colonnes doriques au premier plan, de jupettes de centurions à paillettes et de casques explicites, ou de réinterprétation outrancière du rôle de Cléopâtre qui rendraient aisés un prélèvement factuel d’images et son analyse. L’art est plus diffus, fin et subtil, se mélange à d’autres références historiques et artistiques (la science-fiction, le Moyen Age, le XIXème siècle et son ésotérisme …) et se retrouve autant dans les paroles que les images. Il faut parfois fouiller pour retrouver certaines bribes de sa culture classique et antique issues de son éducation, lectures et centres d’intérêt avoués.

Une question de méthode … 

Je lève de suite quelques questions : pourquoi cet article ? Au départ ce fut une attente et un challenge ancré dans le courant des cultural studies présentes dans le monde anglo-saxon que j’ai accepté de relever l’an dernier. Honnêtement lorsqu’on m’a annoncé « les références historiques liées à l’Antiquité chez Mylène Farmer » j’ai dis  » euh … oui t’as pas un truc un peu plus facile du genre Mylène et les cercueils ? Le sexe ? Les animaux ? La Russie ? ( non, là on va attendre que ça se tasse …)  » hé bien non ! Donc, après 15 minutes d’interrogations aussi profondes que la fosse des Mariannes, j’ai relevé mes manches. Les suites, pour des raisons navrantes n’ayant pas permis la publication espérée, je vous le propose donc ici dans une version retravaillée.

Ce sujet d’étude est particulier. L’oeuvre de Mylène Farmer s’inscrit indéniablement dans la culture pop contemporaine et l’histoire culturel du temps présent. Objet d’étude contemporain, divers par ses déclinaisons ( album, clip, scène, séances photos, merchandising) il s’agit de voir quelles sont ses références à la culture antique, pourquoi et comment elle l’intègre et aboutit à un syncrétisme pop qui lui est propre. Par conséquent, j’ai tenté de dégager quelques thèmes généraux. Je vous laisse juge à la lecture.

Pour cet exercice périlleux qui consiste à analyser une oeuvre en cours, quelle a été la méthode employée ? Quels sont les écueils à éviter ? Le premier, évident, est celui de l’interprétation personnelle et la subjectivité. Ma priorité ici a été de rester fidèle aux faits et surtout aux paroles de l’artiste, d’où les citations des uns et de … l’Autre :). Des sources, au fond classiques, sont disponibles : les paroles des chansons (Mylène ayant souvent affirmé que tout se trouvait dans ses textes, prenons là aux mots donc), les interviewes et entretiens accordés d’une part par l’artiste aux médias mais aussi par ses collaborateurs qui ont accepté de témoigner du travail accompli dans diverses publications. Je ne mentionnerai pas les noms des fans acharnés qui ont entrepris ce travail de retranscription qui a pris des jours voire des semaines dignes des moines copistes des abbayes du Moyen Age, mais leur heures méritent d’être mentionnées. Il y a, enfin et en premier, en l’absence d’accès aux documents de travail personnels, l’oeuvre de l’artiste à analyser, à observer, à recouper entre les images officielles et les « chutes » c’est à dire ce que l’on appelle « les bonus » inclus sur les supports vidéos officiels de la Star qui font forcément l’objet d’un filtrage en amont. Mais ce dernier n’exclue pas une forme d’attention dans ce qu’ils peuvent révéler. Et justement, chez Mylène, les bonus sont très prisés, attendus, souhaités, désirés (tous les qualificatifs peuvent être employés) car estimés révélateurs d’un univers en général ou d’intentions artistiques en particulier qui n’ont pas abouti, le plus souvent pour des raisons pratiques et cohérentes … ou par choix final de l’artiste comme nous le montrerons ici. Enfin, une autre mémoire doit être invoquée : celle des fans qui font circuler d’année en année, via les fanzines et les réseaux sociaux les fakenews rumeurs et autres informations officielles ou non mais révélatrices des attentes, fantasmes et autres semi-réalités propres à un(e) artiste. Malgré leurs caractères parfois délirants, elles ne sauraient être ignorées parce qu’elles sont un révélateur à leur façon de ce que le public perçoit d’un artiste.

Je procèderai donc ici par thème et non par chronologie des albums car les ruptures ne sont pas évidentes d’une période à l’autre sur ce thème précis, chaque album, chaque scène ayant sa tonalité personnelle, les diverses références relevant du paganisme et du christianisme se mélangeant parfois

 

***

Mylène Farmer, Star du Styx et des enfers gréco-latins

Débutons par une évidence … La référence la plus fréquente, voire même la thématique centrale reconnue jusque dans la caricature de l’œuvre de Mylène Farmer est celle de la mort. L’artiste fait très souvent référence au Styx des enfers dans un certain nombre des paroles de ses chansons mais aussi dans le conte Lisa -Loup et le conteur publié en 2003, où dessins personnels et textes se mélangent dans un ensemble complémentaire où elle évoque ( je respecte la forme du texte imprimé ici) :

« […] une lettre manuscrite,

écrite à l’encre

couleur

Styx« 

Bloody lundi

Mais qu’est-ce-qui

Nous englue la planète

Et embrume ma comète

C’est

La loi des séries

Le styx

Les ennuis s’amoncellent

J’ai un teint de poubelle

Coma t’es sexe, t’es styx,

Test statique

Coma t’es sexe, t’es styx,

Extatique

Coma t’es sexe, t’es styx,

Test, test statique

Coma t’es sexe, t’es styx,

Esthétique

C’est sûrement pas être artiste

Que d’frapper sur un piano

C’est sûrement pas être poète

Que d’chagriner la tête vide

Assise au bord du Styx

J’ai bien saisi qu’il faut des multitudes

De cocktails là pour m’apaiser,

J’ai bien une idée de comment contrer colère

Domicile Styx je suis une

Rolling stone

L’instant X, 1995 Dégénération, 2008

 

On est tous des imbéciles (paroles déposées à la SACEM en décembre 1984) Rolling Stone, 2018
Lécythe attique à figures rouges attribué au peintre Tymbos montrant Charon accueillant une âme dans son bateau, v. 500 à 450 avant JC, Ashmolean Museum, Oxford.

En 1996, lors de l’interview réalisée par Paul Amar en mai 1996 pour Paris Première, Mylène Farmer revient sur ce que représente le Styx pour elle :

PA : Spiritualité, vous la voyez quoi ? dans le regard de l’Homme, ou là-haut, une force invisible, supérieure ?
MF :
 Parfois, j’aime l’idée de la force invisible, et je préfère trouver une force et une générosité ici, et de personne à personne. C’est plus important.

Paul Amar : C’est quoi le Styx ?
Mylène Farmer :
Le Styx, c’est ce lac qui est dans l’enfer (sourire de Mylène)

PA : Ah ! Et vous dites ça avec un sourire désarmant ! Vous le connaissez ce lac ?
MF :
 Je l’ai évoqué souvent en tous cas. J’aime beaucoup ce mot. J’aime bien jouer avec les mots.

PA : Et vous l’imaginez comment ce lac ?
MF :
Très noir …

PA : Et l’Enfer ?
MF :
Une idée de l’Homme, dans le fond …

 

Mais c’est surtout le clip accompagnant A quoi je sers… qui met en premier en images le fleuve des Enfers. Les paroles sont rédigées, d’après Mylène, en juin 1989 après la première partie de son Tour entamé le 18 mai. Le titre est intégré à la setlist de la tournée lors de sa reprise en septembre.

 

Quant au clip, sobre, en noir et blanc, il tranche alors avec les précédentes productions baroques et cinématographiques du duo Farmer-Boutonnat (Tristana, Libertine, PQSD). Tourné au lac de Grand-Lieu situé à proximité de Nantes, en Loire Atlantique par Laurent Boutonnat durant l’été 1989, Mylène y joue son rôle en tant qu’allégorie synthétisant les différents personnages féminins des clips incarnés sur les albums Cendres de lune … et Ainsi sois je … . Sur une rive, que l’on devine être celle du Styx, elle attend un passeur vêtu de noir, austère, au teint blafard, une valise à la main, et monte dans sa barque. Ensemble ils traversent une étendue d’eau, peut-être l’Achéron, fleuve du chagrin si nous faisons le lien avec les paroles. Elle finit par retrouver les principaux protagonistes des clips passés, morts pour la plupart dans leurs histoires communes : la rivale de Libertine, le Matador (Sans Logique), le marionnettiste (Sans Contrefaçon), Rasoukine (Tristana), et le Capitaine Alec Parker (PQSD). Mylène les rejoint et laisse le passeur continuer seul son chemin tandis que le groupe part dans l’inconnu du monde des morts. Notons au passage (!) que le rôle du passeur (Charon) a été tenu par … un pêcheur du coin ! Ce vidéoclip à l’époque clôt une ère, celle des années 80 et des deux premiers albums gothiques par excellence. Mais ce clip ne fut pas sans conséquences sur les fans de l’époque : beaucoup croient alors à l’annonce de l’arrêt de sa carrière ! … Justement …

Reste une interrogation sur la genèse de ce titre alors que Mylène est en pleine ascension et reconnaissance par le public. Pourquoi ce titre, inspiré par les écrits de Luc Dietrich [1913-1944] et sans doute le plus pessimiste et dans lequel le plus individualiste de ses fans, avoué ou non, peut se reconnaître ? En novembre 1989, elle explique à Télé 7 Jours l’avoir écrit car c’était la question qu’elle s’était posée. Une autre hypothèse qui a circulé dans les années 90 veut que l’artiste ait rédigé ce texte en prévision d’un éventuel ratage de sa tournée, sentiment sans doute motivé par l’annulation de quelques dates et du caractère inédit et incertain du spectacle proposé.

La dernière mention du Styx par Mylène, est récente et se retrouve dans le documentaire Lultime création consacré à la préparation des concerts de 2019 diffusé en exclusivité sur Amazon Prime à partir de septembre 2020. Mylène y exprime ainsi son retour à la scène en faisant à nouveau référence au Styx :

« Pour ces concerts à l’Aréna, je découvre aussi dans l’équipe de nouveaux visages… ils sont tous parvenus, chacun à leur manière, à l’apprivoiser. Ils m’ont aidé à traverser le Styx pour m’approcher de vous plus près, de plus en plus près »[1].

Elle envisage ainsi le Styx comme la métaphore de la frontière entre la vie publique et la vie privée, la frontière qui la sépare de son public et de la scène, monde d’où elle revient régulièrement à l’instar de certains héros de la mythologie grecque comme Héraclès ou Thésée. L’artiste vit sur scène pour et avec son public : sa vie se situe là. Franchir le Styx signifie ici revenir à la vie artistique, quitter sa vie privée, l’ombre, pour retrouver la lumière, la scène et les médias. Cette idée transparaît souvent dans les choix artistiques de Mylène sans pour autant revenir au Styx à chaque fois comme nous le verrons plus bas. Pour autant Mylène ne s’est jamais assimilée aux héros de la mythologie grecque, précisons-le !

Le Styx n’est pas la seule référence grecque présence dans son œuvre. La mythologie grecque et latine arrive en clin d’œil : dans le clip Insondables (2015) on aperçoit le tableau la chute d’Icare peint en 1636 par Jacob Peter Gowy d’après une étude de Rubens conservée au musée des Beaux-arts de Bruxelles, mélangé à des croquis de Léonard de Vinci. Furtivement, on aperçoit également, très furtivement la Victoire de Samothrace, œuvre emblématique de la période hellénistique conservée au musée du Louvre et universellement connue.

Notons également l’importance de l’imaginaire des fans dans ce registre. En 1998, les fans, impatients du retour de Mylène font courir le bruit d’un retour imminent avec un album intitulé Mes Moires, en référence aux trois divinités du Destin de la mythologie grecque : Chlotho, Lachesis et Atropos. Je signalerai au passage que parmi toutes les fakenews entourant la carrière de Mylène (et il y aurait de quoi faire une thèse en sociologie sur le sujet ….) c’est d’ailleurs celle-ci qui a le plus, curieusement marqué les … mémoires !

Enfin, Le clip de City of love réalisée par Pascal Laugier en novembre 2015 au Château de Chambly. Ce clip fantastique montre Mylène déguisée en créature mi-oiseau mi humaine, tombée du ciel. Elle déambule, à la fois apeurée et curieuse dans une maison et découvre livres et objets divers. Elle s’attarde sur des gravures d’Hendrik Goltz [1558-1617] représentant les amours des dieux de la mythologie gréco-latine : Mars et Vénus, Pluton et Proserpine … L’oiseau s’interroge sur un sentiment qu’il/elle ignore et finit par le comprendre et l’adopter, métaphore de l’animal qui découvre son humanité dans la chute.

Enfin la référence à la culture grecque se retrouve furtivement dans les paroles d’A rebours où elle introduit epsilon dans les paroles ici certainement en tant que synonyme de « vide » en mathématiques. De même, dans Elle a dit, issu de l’album Monkey me (2012), le texte fait brièvement référence à Adonis, mais moins pour le personnage mythologique que pour l’idée de l’éphèbe en général et la rime permise. De même dans Lisa-Loup et le conteur, conte philosophique rédigé en jouant avec les mots, leurs sonorités et les rimes, elle utilise le nom de l’empereur Caligula avant tout pour ces dernières. Enfin évoquons aussi brièvement le clip Sans Logique (1988) où , dans un univers inspiré par Francisco de Goya Mylène devient taureau, renvoyant le spectateur brièvement et inconsciemment au mythe du minotaure.

 

Les concerts : entre temple égyptien et chrétien

Stonehenge s’invite en premier décor
Maquette de la scène du Tour 89 – Photo : auteur inconnu

Les concerts sont devenus l’occasion de mettre en scène et en image un univers, futuriste ou bien tourné vers le passé. Réputés à juste titre pour leur caractère colossal, les concerts de Mylène Farmer se distinguent depuis 1989 par cette utilisation de références où l’histoire et la fiction se mélangent par strates pour donner corps à un univers, propre à la chanteuse. Le Tour 89, sa première scène, ne propose pas contrairement à une idée reçue le décor d’un cimetière (confusion rendue possible par la présence de grilles) mais est inspiré du site de Stonehenge construit durant le Néolithique, comme l’a expliqué Gilles Laurent co-concepteur du concert :

« On est parti des photos de Stonehenge que j’avais trouvées – des pierres en ruine, mystérieusement agencées, véritable observatoire des planètes, qui raconte les hommes face au temps. On y trouvait une liaison symbolique évidente avec l’idée maîtresse des saisons et du temps qui passe. Que cela ait revêtu des habits de cimetière au final, c’est une dérive, sans doute, mais qui raconte aussi « le temps assassin » dont parle « L’horloge »[2].


Gloire à MyIisis

La période Innamoramento qui débute en 1998 fait explicitement référence à Isis et aux dieux égyptiens. Ainsi le Mylenium Tour offre en guise décor une gigantesque statue de la déesse Isis conçue et réalisée par le sculpteur suisse Hans Ruedi Giger connu pour avoir réalisé la créature d’Alien. À l’origine, c’est le chef décorateur Guy-Claude François sollicité par Thierry Suc [3], qui a le premier l’idée de proposer une statue inspirée par l’esthétique des œuvres de Giger, très apprécié par Mylène par ailleurs. Guy-Claude François explique par ailleurs le processus de création de la statue :

« Roger m’envoie les bandes vidéo de son spectacle précédent et je suis absolument stupéfait de l’idolâtrie qui inspire, c’est totalement incroyable : ça me fait penser à une sorte de déesse, égyptienne. Je fais une première esquisse qui la représente et cela tombe assez bien, car Mylène est très attachée à l’esthétique de Giger […][4].

en haut : Illustration de H. G. Giger utilisée par le le groupe de rock britannique Emerson, Lake and Palmer pour leur 4ème album Brain Salad Surgery (1973) / Dessous : croquis de Guy Claude François – Le premier projet de statue représentait Mylène tenant le plateau scénique sur ses jambes repliées / Photo : construction de la statue d’Isis dans les ateliers d’Artefact – 1999

 

Puis, les séances de travail s’enchaînant, finalement Mylène suggère l’idée d’une tête qui s’ouvre pour l’entrée en scène tandis que la statue est inspirée par le tableau numéro 218 réalisé par Giger en 1973. Le visage qui, au départ, représentait celui de sa femme, cède la place à un autre. Le résultat final aboutit à la création une statue haute de 11 mètres dont la réalisation est confiée aux Ateliers Artefacts situés dans le Vaucluse. Le scénario donné, une tête s’ouvrant pour laisser apparaître Mylène en majesté, rappelle inconsciemment un autre scénario de la mythologie, grecque cette fois-ci : la naissance d’Athéna. Mais pour autant cette influence ne semble pas avoir joué. En octobre 1999 Mylène explique son choix au quotidien Belge le Soir :

« Quand j’ai demandé à Giger de pouvoir utiliser et transformer son œuvre, je voulais une entité. J’ai remplacé le visage, qui était celui de sa femme, par celui d’Isis et j’ai ajouté des bras. J’ai choisi Isis car elle a plusieurs visages. J’ai donné naissance à une créature qui, pour moi, est la mère de la nature vivante : elle évoque les quatre éléments naturels, elle est le cinquième »[5].

 

La naissance d’Athéna – Amphore à figures noires, troisième quart du VIe siècle av. J.-C., Paris, musée du Louvre / Entrée en scène de Mylène sur Mylenium – Photo non officielle (collection personnelle) – 1999
Mylène interprêtant Dessine-moi un mouton, 1999- Collection personnelle / Représentation du Dieu Thôt, vallée des Reines, QV44, tombe de Khaemwaset, Frise de Ramsès III, détail

Outre la statue d’Isis, un second élément rappelle la mythologie égyptienne : pour interpréter dessine-moi un mouton Mylène est assise sur une balançoire à double tête d’ibis représentant le dieu Thôt, dieu de l’écriture et de la sagesse.

Cette influence de l’Égypte se retrouve également dans le programme du concert disponible au merchandising. Deux éléments sont visibles : le premier, mystique, propose dans ses premières pages deux odes à la déesse égyptienne très certainement rédigées par Mylène-même :

Le second repose sur l’une des pièces d’archéologie les plus célèbres : la pierre de Rosette, fragment de stèle en granit proposant le décret promulgué par le Pharaon Ptolémée V en 196 avant J.C. et rédigé en trois écritures ayant permis à Champollion de déchiffrer les hiéroglyphes en 1822.

Il m’a fallu l’épreuve

De : c’est chacun pour soi

Avaler des couleuvres

I.A.O/I.A.O

Mon karma est tenace

On est selon « Bouddha »

Héritier de nos actes

I.A.O/I.A.O

Méfie -toi, 1999

 

Plus largement le titre Méfie-toi intègre également une part de mystique en proposant un millefeuille ésotérique philosophique et religieux où les interprétations peuvent varier selon le passage du texte. Nous pouvons y voir une simple référence à Dieu puisqu’IAO correspond à la transcription en grec de Yahvé ΙΑΩ, présente notamment dans les écrits de l’historien grec Diodore de Sicile. Il peut également s’agir d’une référence au génie Iaô révéré par les Ophites, des gnostiques apparus vers l’an 100 ap. JC en Égypte et en Syrie. Dans ce premier cas, les Ophites se définissent comme étant une secte mystique ayant opéré un syncrétisme particulier entre les religions orientales et le christianisme naissant donnant ainsi naissance à une forme de judéo-paganisme destiné à ne pas durer. IAO est à l’époque gravé sur des amulettes censées protéger celui/celle qui la possède.

David Bowie photographié en 1971 par Brian Ward – Premier concept développé pour la pochette de l’album Hunky Dory, finalement écarté.

Il peut s’agir aussi d’une référence antique récupérée et transformée par l’occultisme tel qu’il se développe au XIXème siècle et donc provenir de la pensée d’Aleister Crowley [1875-1947], un astrologue anglais sulfureux (qui pensait être la réincarnation d’un pharaon !) réputé pour ses écrits occultes où il réinterprète les anciens cultes païens de l’Antiquité. Ici Mylène reprendrait sa référence à une trinité égyptienne composée d’Isis (la Nature), Apophis (le Destructeur) et Osiris (le Rédempteur) selon l’interprétation qu’il formule dans le livre IV de son ouvrage ésotérique Magick considéré comme l’un des ouvrages fondamentaux de l’occultisme contemporain. Les trois interprétations se valent : Mylène fait référence à Bouddha, aux lames du tarot, à l’idée d’une connaissance supérieure. IAO se pose dans le texte sans référence précise à ce qui précède ou ce qui suit. Est-ce censé agir comme une invocation ou une formule ou amulette textuelle de protection ? Nous signalerons ici brièvement que la référence à Crowley n’est pas une nouveauté en soi dans le monde de la pop qui, dans les années 60 est marquée par les philosophies orientalistes. On peut d’ailleurs citer l’un des artistes favoris de Mylène Farmer et avec qui l’idée  d’un duo fut évoquée à une époque, David Bowie. En 1971, il sort l’album Hunky Dory dont l’un des titres, Quick Sand, fait explicitement référence à Crowley et à l’occultisme.

Par la suite, quelques éléments issus de l’Égypte antique sont perceptibles et se fondent dans un syncrétisme pop inédit.

Un concert de Mylène sans un fauteuil gigantesque ne serait plus tout à fait le même. Justement, lors du Tour 2009, Mylène interprète Dégénération assise sur un fauteuil en forme d’insecte à mi-chemin entre la lucane et le scarabée, le tout dans une ambiance futuriste. Or rappelons que le scarabée fait référence au Dieu Képri, symbole de la course du soleil et de sa renaissance. Il se conjugue ici aux paroles de la chanson faisant référence au Styx et au coma et à la nécessité de sortir d’un état léthargique quasi mortel et retrouver une vitalité perdue (« faut qu’ça bouge »).

Croquis du fauteuil – Mylène en scène en 2009 – Photo : Claude Gassian

 

Cette référence à l’Égypte ancienne se retrouve également et surtout dans les concerts donnés exclusivement à Bercy du 13 au 29 janvier 2006 et surtout dans la sortie de scène. La sortie de scène de Mylène fut décidée et mise au point très tard. En effet, l’intention artistique originelle prévoyait une disparition de scène de Mylène dans une explosion de flammes. Mais au dernier moment, l’artiste ne le sentant pas, le scénario fut modifié pour une dramaturgie plus élaborée sur le final d’Avant que l’ombre … . Mylène interprète son dernier titre devant un rideau d’eau puis s’en retourne, retire son long manteau rouge, apparaît faussement nue et monte lentement un escalier vers un soleil crépusculaire. Arrivée au sommet, elle se retourne vers le public dans un ultime geste d’adieu.

 

 

Le décor répond à cette scénographie. Composé de plusieurs strates et références qui se répondent les unes aux autres, il est notamment composé d’un escalier montant encadré par des chandeliers monumentaux reposant sur une base composée de quatre cobras. L’escalier fait penser à une rampe funéraire égyptienne, celle du Temple funéraire d’Hatchepsout. Dès lors, cette référence se mêle parfaitement au scénario du concert : Mylène achève le concert ( sa vie artistique ici) et part vers un au-delà au coeur du Temple, et s’élève au fur et à mesure des marches vers une autre dimension, invisible (la mort).

Croquis de la scène en 2006 – Extrait des bonus du DVD Avant que l’ombre …

Temple funéraire d’Hatchepsout – Photo : Daniel Fafard

Le serpent, animal chtonien par excellence dans les diverses mythologies antiques, et symbole de protection royale en Égypte, se fond parfaitement dans l’imaginaire gothique et fantastique de Mylène Farmer qui fonctionne là aussi à plein sur le final du spectacle : Mylène se débarrasse de son manteau et se dirige vers un au-delà mystique et crépusculaire, accompagnée dans sa montée par ces cobras. Dans l’Égypte antique, la mue du serpent est observée par les Égyptiens comme un signe de renaissance. Il est possible d’y voir aussi cette coïncidence, non voulue dans la conception du spectacle mais clairement envisageable, ce dernier incarnant le passage vers l’au-delà. Dans cet ordre d’idée nous retrouvons aussi en Égypte l’une des conventions picturales encadrant la représentation du tombeau d’Osiris dans le Livre des Morts, inclut 12 uraeus. Les serpents peuvent aussi être une référence au dieu Apophis censé s’attaquer chaque nuit à la barque de Rê et être à chaque fois battu. Ici cette interprétation se retrouve renforcée par un projet abandonné que l’on peut entrapercevoir dans les bonus DVD du concert[6] : l’idée d’un portail interne dans la scène où les deux portes étaient censées être ornée l’une d’un soleil et l’autre d’une lune, ce portail renforçant l’idée d’un passage de la Lumière vers les Ténèbres, de la vie vers la mort et ici de la lutte d’Apophis contre Rê le Soleil.

Capture d’écran : DVD Avant que l’ombre Live – Extrait du bonus « scene by scene »

L’imaginaire peut donc dès lors se développer et nous pouvons la voir en écho à l’entrée en scène, la descente du sarcophage vers la scène en forme de croix de Malte, la vie, puis en final la montée vers l’au-delà, une manière de franchir le Styx à nouveau sans le nommer, sans s’y référer explicitement. Nous retrouvons là l’un des aspects fondamentaux de son œuvre qui explique en partie le succès de Mylène Farmer : sa capacité à solliciter la réflexion en superposant des références issues des cultures païennes et chrétiennes. L’interprétation et l’imagination voire l’imaginaire se rejoignent pour trouver des clés de compréhension et de cohérence dans ses propositions artistiques.

Mais la référence la plus explicite à l’Égypte est offerte par le couturier Franck Sorbier, sollicité pour assurer la création et la réalisation des costumes et qui a expliqué en interview comment il a fait le lien entre le scénario de l’entrée en scène de Mylène avec le premier costume :

« Il existe plusieurs influences pour cette tenue. Mylène m’a dit qu’elle arrivait dans une capsule. Ça m’a évoqué tout autant « Star Trek » que les sépultures du Fayoum. J’ai aussi parlé avec Mylène d’une scène du film « Cléopâtre » dans laquelle Elizabeth Taylor amène à César devant le tombeau d’Alexandre un sarcophage en verre. Le côté conquérant me semblait important ; l’idée d’une armure s’est rapidement imposée à moi »[7].

Dans une interview parallèle, le couturier précise encore un peu plus sa vision pour ce costume d’amazone inspirée par l’Égypte :

« Donc il y a ce côté guerrier et en même temps mystique, et toujours cette notion, quand même, victorieuse… Ce qui est important, je trouve, dans toutes les histoires comme ça, c’est la notion de culture. Ce sont des choses qu’on vous raconte, qui vous renvoient tout de suite à ce qui est pictural, à tout un ensemble finalement […]»[8].

Cette référence au film de Joseph L. Mankiewicz sorti en 1963, se double d’une autre, issue de la scène montrant l’entrée triomphale de Cléopâtre dans Rome, installé sur un char monumental accompagnée de son fils, Césarion, né de sa relation avec César. Cette double référence se conjugue à la situation de Mylène en 2005/2006. A l’époque, cela fait 6 ans que Mylène n’a pas sorti d’album, 6 ans s’était écoulée depuis sa dernière scène, une durée vue et vécue alors comme une éternité par ses fans et présentée comme telle dans les médias. Il s’agit ici de conjuguer son retour et symboliquement son « réveil » d’entre les morts  (sans évoquer le Styx cette fois !) et assurer une entrée triomphale dans Bercy. Elizabeth Taylor porte pour l’occasion une tenue à l’image de sa puissance, une robe dorée recouverte d’une cape imitant les plumes d’un oiseau (ici, le Dieu Horus) et parée d’une coiffe comprenant le cobra et la tête de vautour, Ouadjet et Nekhbet, surmontés de serpents entourant Ré, le dieu Soleil. La première tenue de scène de Mylène empreinte clairement à cette influence sans pour autant la plagier, d’autant qu’elle se mêle à une autre : les reliques datant de l’époque romaine regroupées dans des églises d’Europe dont celles de Weyarn et Gutenzell en Bavière et ornées de somptueux bijoux. En effet, après les guerres de religion et la réforme protestante qui ont embrasé l’Europe du XVIe siècle, de nombreuses reliques de martyrs chrétiens sont détruites. Afin de les remplacer, Rome fait déterrer des squelettes supposés être les restes de martyrs chrétiens morts aux premiers siècles et conservés dans les catacombes. Envoyés à partir de la fin du XVIème siècle dans diverses églises où le catholicisme doit subir la concurrence du protestantisme (Allemagne et Suisse en premier), les restes sont richement parés et décorés souvent avec outrance. L’objectif est alors de relancer l’attractivité du catholicisme. Vite dépassé par sa propre démarche qui débouche sur un trafic et des pratiques contestables d’autant que les corps ne sont pas ceux de martyrs, le Vatican finit par y mettre un terme au XVIIème siècle.

L’arrivée de Cléopâtre et de Césarion à Rome, Joseph L. Mankiewicz Cléopâtre, 1963. / La première tenue de scène de Mylène, créée par Franck Sorbier – Photo : Claude Gassian, 2006

 

Reliques de Saint Irénée, dans l’Eglise de Sursee, 1654 © Bobby C. Alkabes

 

***

Jésus j’ai peur ! Références aux Évangiles et imaginaire chrétien 

Adieu Tristana

Ton cœur a pris froid

Adieu Tristana

Dieu baisse les bras

Laissez-la partir

Laissez-la mourir

Ne le dites pas

Tristana, c’est moi !

Si Dieu nous fait à son image
Si c’était sa volonté
Il aurait dû prendre ombrage
Du malin mal habité
Tu dis : « assez des histoires

Ton passé est préhistoire… »

C’est ça l’amour

C’est quoi l’amour ?

Crucifie-moi Ponce Pilate

Noie-toi dans l’eau écarlate

Jésus ! J’ai peur

De la douleur…

Des nuits de veille

Mémoire inachevée,

Qui ne sait… où elle naît

Tristana, déposé le 15 janvier 1987 à la SACEM Sans Logique, 1988 Optimistique-moi, déposé le 17 février 1999 à la SACEM Avant que l’ombre …, déposé le 11 mars 2005 à la SACEM

Nous avons brièvement évoqué les références chrétiennes présentes dans les productions artistiques de Mylène, elles sont incontournables. Lors des concerts de 2006, Mylène fait référence explicitement à l’Ancien Testament et à divers épisodes de la Bible via la transmission qu’en ont effectué les périodes du Moyen Âge et de la Renaissance. Justement pour les concerts de 2006, les références à l’Égypte via le film de Mankiewicz se double d’éléments judéo-chrétiens dans le décor. En effet, la porte monumentale construite par les Ateliers Artefacts reprend des éléments issus des portes du baptistère Saint-Jean-Baptiste situé à Florence : des scènes issues de l’Ancien et du Nouveau Testament. On reconnait en particulier Le Sacrifice d’Isaac, l’Annonciation Jésus chassant les marchands du temple, et La tentation du Christ.

Coffret collector du concert de 2006 et intégral commercialisé en 2021 reprenant des éléments de la porte monumentale inspirés de la porte nord du baptistère – Collection personnelle

Nous pouvons remarquer que par ce choix, Mylène prend aussi une certaine distance et introduit une rupture avec le culte dont elle fut le centre à l’époque du Mylenium Tour. Assimilable à l’époque à une déesse, en choisissant cette fois des références judéo-chrétienne, elle se place à la fois dans une continuité artistique avec l’introduction de références religieuses (cette fois le christianisme, certes né durant l’Antiquité mais actuel et universel) dans son œuvre textuelle et picturale, mais en introduisant une rupture : cette fois elle n’est pas assimilable à l’objet du culte puisque celui-ci ne peut se confondre avec l’artiste féminine, mais au contraire en étant le sujet qui se soumet à l’objet divin[9]. Est-ce une façon de redescendre d’un cran et de montrer qu’elle n’est pas la déesse que certains fans veulent à tout prix ? En 1987, Mylène faisait déjà preuve d’une réelle lucidité sur l’image qu’un(e) artiste peut dégager :

Ne penses-tu pas être un peu prisonnière de ton image ?
-Oui mais c’est là qu’il va falloir être très intelligente ! [10]

Le véritable tournant a lieu en 2001. A la suite d’une polémique engagée par un fan-club qui demandait son officialisation et la critiquait pour son soit-disant manque d’amour, elle tacle sèchement la partie de son public qui exige davantage de sa part :

[…] Je veux qu’on sache que je n’ai jamais été à l’initiative d’un fan-club, ni officieux ni officiel. Je n’adhère pas au culte de ma personnalité.[11]

Par conséquent, j’opte pour cette interprétation suivante : si dès le début de sa carrière, les références judéo-chrétiennes sont présentes, essentiellement dans les paroles, elles demeurent minoritaires jusqu’au début des années 2000, la mystique païenne étant davantage visible, sans oublier les références à la culture du XIXème siècle et du début du XXème siècle avec Baudelaire, Poe, et Apollinaire en tête. En effet la référence à Dieu est présente dès le deuxième single de Mylène Farmer sorti en 1985 On est tous des imbéciles et sa face B depuis largement oubliée intitulée LAnnonciation. Pour autant les paroles, qui font plutôt référence à un avortement, ne sont pas signées par Mylène mais par Laurent Boutonnat à l’époque tandis que le titre est dédicacé à Sainte Thérèse d’Avila. Néanmoins c’est une mystique païenne, largement portée par le public qui s’impose peu à peu et qui connaît son apogée lors du Mylenium Tour en 1999. Mais à partir de la fin des années 90 et surtout à partir de 2006, la rhétorique et les références au christianisme se font de plus en plus présentes à la fois dans les textes, la photographie, certains clips, la scénographie et le merchandising. La croix, premier symbole du christianisme mais bien antérieure à ce dernier est largement présente comme le montre ce petit échantillon visuel :

La présence de la croix, quelques exemples : 1) promo « luxe » du single Je te rends ton amour, 1999, 2) Croix en allumette issue du merchandising des des concerts de 2006 3) Coiffure de Mylène Farmer pour le n°5 on Tour en 2009, réalisée par Bilitis Poirier, photo : Robin / 4) Robe du label Egonlab, collection printemps-été 2022, photo : Marcel Hartmann, 2022

 

Ces choix relèvent-ils d’une croyance personnelle en Dieu ? Bien qu’elle ait reçu une éducation allant dans ce sens ( et Lisa-Loup s’en fait l’écho très indirectement) Mylène tranche très tôt l’interrogation :

« Je ne crois pas du tout mais j’aime ce mot et ce qu’il évoque.

On est toujours en quête de quelque chose après tout, non ? »[12].

En 2008, lors d’une interview accordée à Paris Match, elle rajoute et précise sa pensée :

« La religion est une façon parmi d’autres d’élever son esprit, comme l’art ou la science –pour autant que la religion soit une proposition, et non un asservissement. Mais cette question demeure pour moi de l’ordre privé ».

Dès lors, quel est l’intérêt autre qu’esthétique et textuel pour un artiste pop de mettre en avant des références judéo-chrétiennes, s’il ne s’agit pas d’affirmer des convictions personnelles ? Nous pouvons avancer que cette mise en avant permet justement, et indirectement faire comprendre que d’une part tout le monde a besoin de croire en quelquechose, y compris la star, objet de déification parfois inquiétante de la part de ses fans. Nous supposerons ici que l’instrumentalisation du christianisme par la culture pop a cet avantage de remettre à un certain rang d’humilité et d’humanité, de distance et d’égalité, la vedette avec son public car il est à peu prêt acquis, culturellement, y compris chez les non-croyants que personne ne peut se prétendre l’égal de Jésus, de la Vierge ou de Dieu et encore moins du Saint Esprit. Cela n’exclue pas une forme de curiosité naturelle de l’artiste pour la croyance et les lieux saints d’autant qu’elle a reçu une éducation religieuse qu’elle n’a jamais renié. C’est ainsi que quelques photos issues d’une paparazzade ont révélé que Mylène, adepte des découvertes, a profité de l’occasion pour visiter le Mur des Lamentations, dernier vestige du Grand Temple de Jérusalem, en marge du tournage du clip de Lonely Lisa réalisée par Roy Raz en mai 2011. Enfin, reste le cas du clip illustrant Je te rends ton amour, tourné en mai 1999 à l’abbaye Notre-Dame-du-Val située à Mériel dans le Val d’Oise et qui, à l’époque fait l’objet d’une censure. Si le texte use de références liées à la peinture et à Egon Schiele et Paul Gauguin, le clip quant à lui propose Mylène dans le rôle d’une jeune femme aveugle venue se confesser. Le Diable prend son corps en possession : des stigmates apparaissent sur ses poignets tandis qu’un bref plan la montre crucifiée telle une martyre de l’Antiquité. Les stigmates ne sont cependant pas propres à l’Antiquité dans la mesure où ce phénomène émerge au XIIIème siècle, contrairement au crucifiement, dont l »idée est reprise également sur la pochette du titre :

Mais contrairement aux récits chrétiens qui visent à établir une légende dorée autour des saints, ici, l’histoire s’achève sur le Diable sortant de l’abbaye sous la forme de la jeune femme.

Sainte Marie-Madeleine
Photo (C) RMN-Grand Palais / Jean-Gilles Berizzi

En dehors des allusions à Dieu et Jésus, trois autres peuvent être relevées. La première est celle de la figure de l’ange, créature centrale de la Bible hébraïque, que Mylène invoque très souvent dans ses textes autant pour son aspect bienveillant que malfaisant comme le veut la tradition d’origine (Que mon coeur lâche, Rêver, Ange parle-moi, C’est dans l’air, Diabolique mon ange, A rebours …). La seconde référence est celle de la Vierge Marie, présente dans quelques rares textes : Ici bas, issu de l’album Monkey me, et peut être Fuck them all mais sans certitude. A cela s’ajoute le fait que Mylène a interprété l’Avé Maria de Schubert, avec le texte de la prière catholique latine inspirée des Évangiles et dont les premières versions remontent au IIIème siècle après J.C. Ce titre n’a cependant pas fait l’objet d’une exploitation, il est uniquement présent sur quelques supports de l’album Point de suture sorti en 2008  et … en piste cachée ! 

 

Enfin, la présence de la figure de Marie-Madeleine, personnage féminin central des Évangiles est également visible dans deux clips : Pardonne-moi, réalisé par Laurent Boutonnat en 2002 où Mylène incarne un personnage féminin qui y fait penser, et Redonne-moi  dont la réalisation a été assurée par François Hanss en 2005, sans doute plus connu pour avoir réalisé La séparation la même année, téléfilm documentaire consacré aux débats parlementaires sur la loi de séparation des Églises et de l’État en 1905. Considérée comme la prostituée et la pécheresse repentie et pardonnée par excellence, on peut y voir un double antique à Libertine d’autant que la représentation matérielle choisie dans Redonne-moi n’est pas anodine. En effet, il s’agit de la statue conservée dans l‘église d’Ecouis, daté de …. 1313 où Marie-Madeleine apparaît nue, pénitente, revêtue de ses seuls cheveux.

 

 

Capture d’écran du clip « Pardonne-moi »

 

De mutilation

En extrême onction

Agnus dei

Moi l’impie

Je suis saignée aux quatre veines

 

« Agnus Dei

Qui tollis

Peccáta mundi

Miserére nobis

Miserére nobis »…

 

Agnus Dei, 1991

 

Parmi les autres références lisibles inspirées des Évangiles, nous pouvons aussi citer le titre Agnus Dei qui ouvre son troisième album studio LAutre … sorti le 8 avril 1991. Ce titre s’appuie ouvertement, dans son refrain, sur la prière inspirée par l’Évangile selon Jean, très certainement rédigé au 1er siècle après JC. Mais la prière en elle-même est fixée plus tard et est utilisée dans le rite romain au moins au VIIème siècle. Mais plus généralement, Mylène ne dédaigne pas le latin dans ses textes ou autre. Ainsi dans le merchandising de 2019, le titre de son album Désobéissance est traduit en latin et accompagné des dates des concerts en chiffres romains sur l’un des t-shirt proposé à la vente.

Maître corbeau …

Pochette de l’album L’autre … sorti le 8 avril 1991 – Photo : Marianne Rosenstiehl

Les animaux font partie intégrante de l’univers personnel et artistique de Mylène : singe, cheval, chien, et surtout le corbeau, noir. Ce dernier apparaît de manière ouverte la première fois en 1991 sur la pochette de son titre ayant eu le plus de succès : Désenchantée, commercialisé en mars 1991, puis sur la pochette de son troisième album studio L’Autre … Dernièrement c’est l’affiche des concerts à venir en 2023 qui le met à l’honneur.

Le corbeau, oiseau universel, est présent sur tous les continents et dans la plupart des mythes antiques. Oiseau de malheur dans certains cas (mythe d’Apollon et de Coronis), messager bénéfique dans d’autres (la Bible), il reste cependant synonyme d’oiseau de malheur lié à la mort et aux mauvaises nouvelles à cause de sa couleur et de son caractère charognard. Lors d’un entretien accordé à la Libre Belgique, publié le 30 avril 1991, Mylène est interrogée sur ce choix artistique et parle bien de cet inconscient collectif, lié à la culture antique partagée par le plus grand nombre :

 

Dominique Simonet : De qui est l’idée du corbeau sur la pochette ?
MF : Alors là, vous me posez une colle ! Je ne sais plus du tout ! Par contre, le choix de la photo est de moi. En ce qui me concerne, je ne la trouve d’ailleurs pas effrayante du tout, mais l’inconscient collectif doit évidemment fonctionner. Pour moi, elle est plutôt très reposante. Si chez nous cet oiseau est perçu comme un symbole de mauvais augure ou de mort, il n’en va pas de même partout. En tout cas, sa présence n’a rien de provocateur.

Quelques jours auparavant sur le plateau du JT de TF1, elle entretient déjà le paradoxe quant à ce choix, refusant de trancher en faveur d’une symbolique particulière, manière de laisser au public le soin de choisir sa propre interprétation :

« j’aime bien ce paradoxe justement. Le corbeau étant un oiseau de malheur ou de mauvais augure, et moi, je l’ai choisi comme quelqu’un de protecteur. Ce pourrait être l’autre. Et j’aime le contraste du noir et du blanc. Il y a de multiples symboles pour le corbeau ; je ne suis pas sûre que cela soit très intéressant de tous les évoquer !« 

Apollon et le corbeau Coupe en céramique à fond blanc (480-470 av J.C.), musée de Delphes. Photo : JP Dalbéra

En ce sens, la symbolique du corbeau, oiseau païen par excellence, est plutôt ici celle développée dans l’Antiquité romaine avec le culte du Dieu Mithra et résonne avec le titre éponyme de l’album : l’Autre « cet étrange messager » décrit explicitement comme un ami dans le texte de la chanson. Médiateur entre le monde des hommes et des Dieux, des morts et des vivants, il est un symbole solaire qui sonne comme une renaissance, un animal qui comme auprès de Mithra conjure le mauvais sort. Cette représentation tranche avec celle plus tard développée dans le clip accompagnant Fuck them all (2005) où le corbeau est davantage dans son rôle de charognard à abattre, tandis que l’affiche des concerts de la future tournée intitulée Nevermore a pour cadre l’oeil d’un Corvus corax porteur d’une hypothétique mauvaise nouvelle. En effet, une rumeur veut qu’il s’agisse ici de la dernière tournée de l’artiste.

Affiche de la tournée Nevermore mélangeant l’oeil d’un corbeau avec une partie de l’affiche du Tour 89. Photo : Marianne Rosenstielh.

***

Mylène, une stoïcienne qui s’ignore … ou pas !

L’ennui naquit un jour gris

D’une uniformité que je

Sais invincible

Je m’ennuie

C’est le vide

Déesse

Détresse

Il nous faut une révolution

Pour créer l’envie

L’âme est ainsi

Y a pas de génie sans grain de fo…

Sans grain de folie !

 

Nullum magnum ingenium sine mixtura dementiae fuit

Je m’ennuie, 2008 Lonely Lisa, 2011 Sénèque qui l’attribue à Aristote dans De tranquillitate Animi, XVII, 11. Rédigé entre 49 et 62 ap. JC

De l’avis unanime des fans, Mylène doit aussi une bonne part de son succès à ses textes. L’influence indirecte de Sénèque est perceptible dans Lonely Lisa. Mais outre cet emprunt rappelons qu’en dehors de la mort et des diverses déclinaisons du désespoir dont elle reste la championne parmi les artistes pop, l’ennui est aussi, avec la mélancolie, un de ses thèmes de prédilection. Ces deux derniers se retrouvent de manière explicite dans deux chansons quasi éponymes. D’abord L’Ame-Stram Gram, premier extrait de l’album Innamoramento qui est, en 1998, sans doute le premier texte où elle y fait référence de manière aussi explicite. D’autre part dans le conte Lisa-Loup […] précédemment évoqué une part est faite à cet aspect à travers une « petite goutte-enfant » de sang prénommée ENNUI qui achève le conte, de cet ennui qui empêche de vivre, le titre résonnant comme un écho à venir au single à venir. L’un des derniers dessins du conte, assuré par Mylène, se termine justement sur une Lisa faisant face à cette petite goutte de sang. Mais l’histoire ne s’arrête pas là à l’époque : le 15 décembre 2008 lorsque Mylène décide de créer son propre site communautaire lonely-lisa.com (une première), ce dernier est sous-titré « le site communautaire de l’ennui ». L’idée est d’inciter les participants (essentiellement ses fans) à partager leurs créations.

Capture d’écran du site lonelylisa.com annonçant la version de ce dernier – fin octobre 2009

En ce sens, elle rejoint les préoccupations des auteurs grecs comme Hippocrate, et des auteurs romains stoïciens du 1er siècle ap. JC qui se sont intéressés à l’état mélancolique.

Rome traverse à cette époque une crise politique et morale profonde liée à l’émergence du principat. Les valeurs de la République s’effondre, le citoyen n’est plus au centre de la vie politique et sociale, entraînant doutes et pertes d’illusion chez l’individu. Comme le rappelle Géraldine Puccini, la vie romaine est structurée par un axe fondamental : l’alternance du negotium et de l’otium, le premier cède la place au second, c’est-à-dire le vide et donc, à terme, l’ennui, le taedium, exploré et analysé, entre-autre, par Sénèque dans De tranquillitate animi. Cet état pousse à la méditation sur le temps qui passe tout en alimentant ses propres craintes qui empêchent de savourer le temps présent et qui peut entraîner le repli sur soi[13]. Ce sont justement ces différents aspects de la réflexion stoïcienne, dont l’actualité n’est pas à démontrer que l’on retrouve dans un certain nombre de texte de Mylène Farmer et qui explique aussi son succès, car répondant à des questions et des angoisses intemporelles partagées par le public.

 

Rome antique et Romantisme

Mais c’est surtout le clip insondables[14] où la chanteuse n’apparaît pas directement, qui propose de multiples références à Pompéi, cité romaine engloutie par le Vésuve en 79  av. JC. Réalisé par Eve Ramboz et Annie Dautane en 2015, ce clip d’une durée minimaliste de 2’39 et conçu comme une ballade dans une ville imaginaire, mélange à la fois des références explicites à la carrière de Mylène (photos, objets, symboles) à diverses références artistiques et historiques comme Yves Klein et Léonard de Vinci. Dans ce clip qui se situe dans le sillage artistique du générique de la série de HBO, Rome tour à tour nous reconnaissons sans mal de nombreuses fresques de la cité par exemple :

-La course de chars située dans la maison du Quadrige, allusion à l’un des animaux fétiches de Mylène très présent dans ses clips et sa vie personnelle :

Capture d’écran du clip

 

-Une fresque issue de la Maison des chastes amants où l’on peut entraperçevoir une allusion au couple artistique et personnel qu’elle a formé avec Laurent Boutonnat avec la présence dans le coin de deux lettres : L et M

 

 

-Le serpent de la maison du Verger

 

-Le caldarium (salle chaude) des thermes du forum, mêlés à une tête de jeune femme signée Léonard de Vinci et qui, par ailleurs reprend une pose classique prise par Mylène lors de ses séances photos studios et qui privilégie le côté gauche et les yeux baissés.

 

 

-Des corps des victimes lors de l’éruption du Vésuve en 79, présents dans le Jardin des fugitifs où une dizaine de personnes avaient tenté de se réfugier,

 

On relève aussi la présence d’un buste que l’on devine aisément être celui de Vénus ou d’Aphrodite, ce qui nous renvoie aux références romaines présentes dans un autre clip : Redonne-moi.

Mélangées, ces références figent dans le temps et un espace déterminés, tout comme Pompéi, l’univers de l’artiste en offrant délibérément des clés de compréhensions que seuls un archéologue ou un fan archéologue peut et veut décrypter. Rappelons-le, ce clip, conçu aussi par les réalisatrices comme un jeu pour les fans, est avant tout destiné à un public qui connait l’artiste. Le clip s’assimile finalement à un chantier archéologique exemplaire et propre à la pop culture qui observe le schéma suivant : les fans/le public découvrent le clip, le déblayent, le décrivent, le décryptent, l’analysent à partir de leurs connaissances antérieures, soutirent des informations parcellaires et inédites pour, ensuite, proposer de nouvelles clés de compréhension de l’œuvre. Ici le clip propose délibérément de (re)découvrir l’artiste à travers des éléments matériels et picturaux représentatifs de son œuvre.

Dans le même registre archéo-pop, le clip Redonne-moi tourné en novembre 2005 mérite que l’on s’attarde sur quelques détails parfois non visibles au premier abord. Le scénario, très simple, est le suivant : Mylène qui est ici un fantôme (qui se promène justement… comme dans le texte !) déambule dans l’atelier d’un artiste au milieu de plusieurs œuvres prenant la poussière.  Quelques arrêts sur image et une série de photos prises en novembre 2005 aux studios SFP de Bry-sur-Marne (Val-de-Marne), lors de la préparation du clip [15] révèlent une présence discrète mais certaine de références à certaines oeuvres de l’Antiquité romaine en arrière-plan. Outre des références judéo-chrétiennes (Christ, mise au tombeau …), on distingue furtivement une stèle funéraire grecque et une peinture de ruine antique, caractéristique de la peinture italienne des XVIIème et XVIIIème siècles où les monuments du passé sont ouvertement réinventés, voire complètement fantasmés.

Dans les coulisses du clip : photo de François Hanss, 12 novembre 2005 (source : page facebook officielle du réalisateur)

 

Elle finit par s’arrêter devant une statue, un nu féminin la représentant, et qui reprend la position de la chanteuse photographiée en 1995 par Karl Dickenson pour la pochette du single Rêver [16]. Durant le clip des plans rappellent sa création par un sculpteur au visage invisible. Mylène finit par arrêter ses gestes. Cette statue renvoie à la sculpture antique mais aussi à sa manière au thème de la muse en général et au mythe de Pygmalion et Galatée en particulier et à cette dernière. D’après le récit d’Ovide, Pygmalion était sculpteur de talent et célibataire car détestant les femmes ; il finit cependant par sculpter dans l’ivoire une femme si belle qu’il en tombe amoureux. Il obtient d’Aphrodite qu’elle donne vie à la statue, faisant d’elle une mortelle nommée Galatée. Le mythe interroge avant le lien entre l’artiste et sa création et ce lien peut rappeler la relation parfois difficile entre la chanteuse et Laurent Boutonnat, ce dernier ayant souvent été surnommé le « Pygmalion » de Mylène Farmer dans les années 80. Nous pouvons aller justement plus loin dans la symbolique de ce clip. A partir des années 90, Mylène commence à s’émanciper de la tutelle artistique de Laurent Boutonnat et s’affirme de plus en plus, sans pour autant renoncer aux collaborations de celui qu’elle a souvent estimé être son jumeau. Ainsi elle commence à signer ses propres musiques, impose ses choix artistiques, tandis que le Mylenium Tour est conçu et réalisé sans sa participation. La muse sait s’émanciper de son pygmalion tout en sachant revenir vers lui à l’occasion.

Verso de la pochette du promo single Rêver, envoyé aux médias en septembre/octobre 1996 / Statue réalisée pour le clip Redonne-moi. Photo : François Hanss, novembre 2005

Le clip met en avant la muse et/ ou une Mylène / Galatée qui, morte, se remémore le passé soit se pose en parallèle de l’artiste émancipée de son Pygmalion que l’on ne voit quasiment pas ou peu mais qu’elle retient dans sa création avant qu’il ne commette le geste de trop ou bien pour lui signifier qu’elle est vivante et mortelle … comme son public, comme nous.

Capture d’écran du clip Redonne-moi

 

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Bibliographie indicative 

-Périodes historiques

-Carole Alkabes Martyrs, les reliques oubliées, Favre, 2018, 216 pages

-Jean Chevalier et Alain Gheerbrant Dictionnaire des symboles, Paris, Robert Laffont, 1982, 1062 pages, coll. Bouquins

-Julien d’Huy Interlude. Le serpent a-t-il volé le soleil ? in revue Cosmogonie la préhistoire des mythes, 2020, la Découverte, collection SH/ Sciences sociales du vivant, 384 pages – extrait p. 165-174.

-Michel Pastoureau Le corbeau. Une histoire culturelle, Paris, Seuil, 2021, 160 pages

-Géraldine Puccini De l’ennui (taedium uitae) au dégoût de soi (fastidium sui) dans le De tranquillitate animi de Sénèque, in Gérard Peylet (dir.) L’ennui, 2013, Presses universitaires de Bordeaux, 394 p.

-Ernest Renan Marc Aurèle et la fin du monde antique, Paris, Calmann-Lévy, 1882, extraits p. 130-147.

 

-Pop-culture et société du spectacle

-Guy Debord La société du spectacle, Paris, Gallimard, 208 pages, coll. Folio

-Richard Mèmeteau, Pop culture. Réflexions sur les industries du rêve et l’invention des identités, Paris, Éd. La Découverte, Zones, 2015, 250 pages

 

-Mylène Farmer

Supports officiels 

  • …. toute la discographie et vidéographie de Mylène Farmer !
  • Chaine Youtube officielle de Mylène Farmer
  • Mylène Farmer Lisa Loup et le conteur, Paris Éd Anne Carrière, 2003, 180 pages

Autour de Mylène Farmer 

– Annie et Bernard Reval, Mylène Farmer – De chair et de sang, Paris, France-Empire, 2004, 280 pages

Les enrubannées, Haute Couture : hommage au ruban, Paris, éditions du panama, 2006, 159 pages

– Benoît Cachin Mylène Farmer Au fil des mots, Paris, Gründ, 2016 pour la 3ème édition, 256 pages

– Fanzines consacrés à Mylène Farmer : IAO, Styx Magazine, MFIFC

– Sites internet (par ordre alphabétique) : Innanet, Mylène.net, site du Docteur Jodel

 

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Notes :

[1] L’ultime création, réalisateur : Mathieu Spadaro, sorti le 25 septembre 2020 sur Amazon prime

[2] Gilles Laurent pour le fanzine IAO Mylène Farmer, 1er trimestre 2006

[3] Thierry Suc est le producteur et manager de Mylène Farmer depuis 1989.

[4] Annie et Bernard Réval  De chair et de sang, extrait, p.175

[5] Interview réalisée par Thierry Coljon, Le soir, 9 octobre 1999

[6]   DVD Avant que l’ombre, extrait du bonus « scene by scene »

[7] Franck Sorbier, interview pour le fanzine IAO, 2006

[8] DVD Avant que l’ombre …, bonus, interview de Franck Sorbier

[9] Relativisons : certains fanarts des années 2000 ont envisagé Mylène en Christ cruxifié(e) notamment pour illustrer un hypothétique single pour le titre Agnus dei. De son côté Mylène Farmer a « osé » la posture de la crucifixion dans le clip accompagnant Je te rends ton amour, justement pendant la période Innamoramento où ses propres créations la confondent avec l’objet d’un culte.

[10] Interview menée par Hervé Naguet, Face A, Juin 1987

[11] Interview menée par Dany Jucaud Paris Match, 6 décembre 2001

[12] Véronique Philipponnat, ELLE, 23 décembre 1991

[13] Géraldine Puccini, De l’ennui (taedium uitae) au dégoût de soi (fastidium sui) dans le De tranquillitate animi de Sénèque, in Gérard Peylet (dir.) L’ennui, 2013, Presses universitaires de Bordeaux, 394 p.

[14] Extrait de l’album Interstellaires, sorti en 2015.

[15] Partagée par la réalisateur François Hanss sur sa page Facebook (8 ans plus tard…)

[16] Cette séance est la seule officielle connue où Mylène a posé nue devant un objectif. Les clichés de la séance n’ont jamais été diffusés officiellement au-delà de la pochette pour Rêver.

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Merci à Obi Wan, Maître de Conférence, expert « en la matière » pour l’échange, ses relectures et pistes suggérées. Merci d’avoir considéré que cela ne méritait pas un coup de sabre, place de la Discorde 🙂