Que font une fan de voile et un plongeur, géographes par ailleurs, lorsqu’ils se rencontrent ? Ils défrichent un nouveau champ de recherche sur le sujet pardi !

Lors d’un exposé passionnant, à la parole bien partagée, Camille Parrain ([post doctorante à l’université de la Rochelle) et Olivier Musard (chargé de mission à l’Agence des Aires Marines Protégées) nous ont fait découvrir ce qu’ils ont convenu de considérer comme des « territorialités en mouvement », les milieux marins et sous-marins.

Ces milieux marins et sous-marins sont déjà particuliers de par leur altérité, immensité, leur multidimensionnalité (l’aérien, la surface, le sous-marin) mais également de par les enjeux qu’ils suscitent tant sur les plans économique, géostratégique et environnemental. D’ailleurs, fédérer les acteurs semble indispensable mais dans quels réseaux, quelles régions ? Le terme de « merritoires » est avancé.

La conférence est aussi l’occasion de repartir sur des bases. Qu’entend-on par paysages marins et sous-marins ? La langue anglaise semble apporter davantage de puissance sémantique à ces questions puisque l’on parle de « oceanscape », de « seascape », de « undersea landscape », de « marine landscape » ou « encore de benthoscape ».

Et surtout qu’observer ? Sur quel support ? Via quelles temporalités ? Le temps long d’une transatlantique, le temps plus bref d’une plongée. Avec quels repères ? Les uns figés en environnement sous-marin, d’autres constamment en mouvement en surface ? Sous quel angle de vue ? La vue sous-marine est nécessairement oblique, voire verticale.

Avec des schémas très clairs, les intervenants proposent une méthodologie de lecture de ces paysages à travers une sorte de système global avec toutefois quelques nuances:

Pour le monde marin, interviendraient :
– le trafic (bateaux),
– le courant,
– la donne météorologique,
– la faune (oiseaux), la flore (algues)
– les déchets, les Objets Flottants Non Identifiés.

Pour le monde sous-marin :
– le trafic (épaves, plongeurs)
– le courant,
– la faune et la flore,
– les déchets également
– la présence de relief.

Et s’il est rappelé que le paysage n’existe que lorsqu’on l’observe, peut-on se demander s’il existerait en dehors des itinéraires de navigation ?

Comment l’immortaliser pour l’étudier ? La présence humaine continue n’est pas toujours possible d’où la nécessité de recourir à des relevés réguliers automatisés, notamment en milieu sous-marin où des observatoires pourraient s’établir pour prendre des photos de manière fixe ou déroulante ou bien encore avec le secours de la vidéo.

Camille Parrain et Olivier Musard en concluent avec la satisfaction de voir déjà certains paysages reconnus comme tels (en Polynésie, en Guadeloupe, en Méditerranée) et avec la conviction, ici transmise, que ces objets sont dignes d’être étudiés en recherche et intégrés aux politiques publiques de sauvegarde de l’environnement.

Une conférence rafraichissante, vraiment originale sur des espaces que l’on considère souvent uniquement au travers de l’angle de la ressource et qui, cette vision esthétique ajoutée, devraient pouvoir légitimer encore leur besoin de protection urgente.