Atelier organisé par l’IREMAM – Axe Éducation Introduction
Cette année, l’IREMAM (Institut de Recherches et d’Etudes sur le Monde Arabe et Musulman) a organisé deux ateliers sur la thématique « Enseigner les mondes arabes et musulmans » à destination des enseignants du second degré et des étudiants préparant les concours.

Le premier atelier, qui s’est déroulé en janvier 2017, était articulé autour des relations entre enseignement et recherche. Les thématiques abordées étaient les suivantes :

  • L’histoire de l’Islam médiéval dans les programmes scolaires, entre regard critique et approche pratique
  • Enseigner une histoire locale de l’Algérie : sources en enjeux
  • Bagnards algériens en Nouvelle-Calédonie : histoire et mémoire de colonisations
  • Le conflit israélo-palestinien : enjeux, politiques, débats historiographiques et défis didactiques.

Le second intitulé « Détours pédagogiques » s’attache, quant à lui, à l’utilisation de ressources numériques comme supports et sources pédagogiques.

  • La mise en récit par le jeu vidéo_Cédric Parizot

Cédric Parizot, anthropologue du politique travaille à l’élaboration d’un jeu vidéo réalisé en collaboration avec Douglas Éric Stanley et Jean Cristofol, professeur de philosophie. A Crossing Industry plongera le joueur dans le monde de l’économie informelle qui se développe dans les espaces frontaliers israélo-palestinien.
L’intervention de Cédric Parizot nous permet de rentrer dans le processus d’élaboration du jeu vidéo et de comprendre les dynamiques qui ont animé et continuent d’animer ses concepteurs.
En effet, les premiers résultats avaient mis en évidence un décalage entre le langage graphique, à la recherche d’esthétique, et le discours du chercheur, passeur de savoirs. Ils étaient alors surtout le reflet des artistes et de leur propre perception, aboutissant à un régime de dénonciation et de visibilité.
Mais le projet, construit dans un cadre de collaboration a conduit les participants à faire évoluer leur vision et leur démarche de cet espace israélo-palestinien.
Ce retour réflexif sur les pratiques de chacun a permis d’ouvrir un espace social interrogeant le modèle visuel et sa construction territoriale de l’espace.
La production du jeu s’est donc ensuite articulée autour de cette réflexion sur les espaces frontaliers et leur porosité. Il s’agit dès lors, de modéliser l’enchevêtrement de ces espaces israéliens et palestiniens et à une échelle plus fine, de mettre en scène la dissymétrie du rapport temps-espace.
Ainsi articulée autour de deux approches, ethnographique et artistique, la sortie du jeux est prévu dans le courant 2018.

  • Le web et ses archives comme ressource pédagogique : de l’histoire du temps présent à l’éducation aux médias et à l’information
    Sophie Gebeil

En s’appuyant sur son travail de thèse « La fabrique numérique des mémoires de l’immigration maghrébine sur le web français (1999-2014) » soutenu en 2015, au cours duquel elle s’est interrogée sur le discours du Web et son éventuelle originalité par rapport à la mise en visibilité des mémoires maghrébines, Sophie Gebeil, maître de conférence à l’ESPE d’Aix-Marseille et au laboratoire TELEMME, revient sur l’intérêt des archives web comme ressources pédagogiques.
Son travail est ainsi basé sur les archives web de l’INA et de la BNF qui lui permettent de comprendre comment la toile a été mobilisée par les acteurs mémoriels pour donner à voir une autre histoire de l’immigration. Ces archives web, d’abord corpus documentaire mouvant, qu’il a fallu stabiliser, s’avèrent être des sources historiques inédites pour l’histoire contemporaine. Dans le cadre de cette étude, l’intérêt de la loi DADVSI (loi 2006-961) relative au droit d’auteur et aux droits voisins dans la société de l’information, est tout particulièrement évoqué.
Complété par un travail d’enquêtes orales, c’est bien la question des temporalités qui est au cœur de la réflexion et le sujet se trouve ainsi replacé dans le temps long. Le regard de l’historien est posé sur le contenu en ligne afin de le replacer dans l’enchevêtrement du temps.
Forte de cette expérience, Sophie Gebeil exploite le web comme ressource pédagogique avec ses étudiants auxquels elle propose un travail autour des événements du 17 octobre 1961. Un regard croisé sur le web documentaire de RaspouTeam, et sur celui de Thomas Salva et Wilfrid Estève, La nuit oubliée – 17 octobre 1961 (2011) est proposé, afin de décortiquer les mises en scène de chacun des deux.
Sophie Gebeil propose un élargissement de ce travail à un public de lycéen dans le cadre du parcours Éducation aux médias et à l’information. Le croisement des sources et l’analyse des conditions de production permettent une pratique citoyenne des médias.

  • La guerre civile algérienne (1998-2000) à travers les arts
    Chafik Bouzaher
    Dans le cadre du programme d’histoire de la classe de 3e, Chafik Bouzaher, professeur d’histoire-géographie à Vitrolles, propose une séquence intitulée « La guerre civile algérienne », qui s’inscrit dans la quatrième question « Enjeux et conflits dans le monde depuis 1989 » du thème 2, « Le monde depuis 1945 ».
    Au cours des trois heures qu’il accorde à cette séquence, Chafik Bouhazer étudie la guerre civile algérienne à travers les arts. Il propose à ses élèves un travail élaboré à l’aide d’un corpus documentaire qui fait la part belle au cinéma : Des hommes et des dieux de X. Beauvois (2010), Algérie 1988-2000 : autopsie d’une tragédie de S. L’abat et M. Aït-Aoudia (2003) et Le Repenti de M. Allouache (2012). Cette approche cinématographique est rendue possible grâce aussi à l’émergence d’une génération de réalisateurs franco-algériens.
    L’utilisation de ressources cinématographiques associés à d’autres sources, permet aux élèves de faire un pas de côté et d’avoir une réflexion autour du cinéma fiction, pris non pas comme témoignage mais comme revendications.
    La langue de l’autre ou l’autre langue ? Le bilinguisme comme outil créatif en édition et en ateliers artistiques, et la question de la traduction_Mathilde Chèvre
  • Mathilde Chèvre, chercheuse associée à l’IREMAM, et spécialisée dans la littérature de jeunesse, s’intéresse à la langue de l’autre. Dans le cadre d’ateliers d’écriture plurilingue elle s’est interrogée sur la façon dont les éditeurs arabes géraient les tensions linguistiques qui peuvent apparaître entre la langue parlée et la langue littéraire. Cette dichotomie doit être dépassée et au contraire s’imbriquer. Pour Mathilde Chèvre, la littérature pour enfant, est particulièrement indiquée pour redonner de la porosité, là où parfois il y a séparation. La poésie est pour elle la solution permettant de parvenir à un niveau de poésie dialectique.
    Dans la lignée de la Nahda, il s’agit de parier sur la langue afin non seulement de dire le monde mais également de se le réapproprier.