Michel NEYROUD répondait à la question suivante :

« Pourquoi l’Éthiopie est-elle un état qui réussit à rester indépendant dans l’Afrique coloniale du XIXe siècle ? »

La réponse est donnée par Jean GALLAIS, dans un ouvrage de qualité: « Une géographie politique de l’Ethiopie. Le poids de l’Etat », Economica, 1989, notamment p. 22-23, « aspect géopolitiques de la délimitation des frontières ».
Il semble bien que le maintien paradoxal d’un Etat souverain soit le résultat de l’interaction entre :
– L’unité culturelle et montagnarde avec un projet millénaire éthiopien conquérant vers la mer et le Sud,
– L’habileté de l’empereur Ménélik qui sut obtenir la reconnaissance d’une « Grande Ethiopie » face aux appétits anglais et français sur les flancs Est et Ouest du bastion de hautes terres d’Abyssinie, en favorisant les seconds au détriment des premiers, … lesquels seconds (Français) fournirent des armes à Ménélik. Celui-ci s’en servit contre les Italiens au Nord (triomphe d’Adwa),
– L’appartenance au monde chrétien, dont le traité de Berlin excluait toute colonisation (avec l’appui russe orthodoxe).

>> C Tambareau
En plus de la difficulté d’envahir physiquement l’Ethiopie ( …), c’est un pays chrétien depuis le IVème siècle ( majorité orthodoxe),
http://www.lejourduseigneur.com/thema/religions/eglise_ethiopie/main_religions.htm

qui a du connaitre très tot un sentiment national
http://www.lesnouvelles.org/P10_magazine/11_litterature/11005_berhanu.html

>> J.Barot

(.) Il n’existait qu’un Etat comparable : Madagascar. On sait que Galliéni et Lyautey ont eu beaucoup de mal à le soumettre…
En ce qui concerne l’Ethiopie, les Italiens ont subit le terrible défaite d’Adoua en 1885. C’est la première défaite d’un pays européen face à un peuple « de couleur » (on l’oublie souvent : on parle généralement de la défaite russe face au Japon en 1904…).
Il y a une autre exception, très particulière, celle du Liberia. Mais – je pose la question – les noirs américains qui ont créé cet Etat n’étaient-ils pas en fait des sortes de colonialistes ?

>> J Silva Maia signale

Le FINANCIAL TIMES (.) publie un supplément de 6 pages sur l’Ethiopie – en anglais, bien entendu -. Il est surtout consacré aux questions economiques et les conséquences des disputes avec l’Erytrée sue ce plan, mais au moins l’article de fond – Proud people seek a positive image – peut être probablement utile pour comprendre le cadre historique posé par la question
www.ft.com/ethiopia2002.

>> P Retailleau

L’Ethiopie a longtemps fasciné les Européens : on prétendait que le fils de la reine de Saba et du roi Salomon en était à l’origine… Considérée comme un « môle » chrétien au sein d’une Afrique « islamo-animiste », l’Ethiopie faisait ipso facto figure de contrée
« civilisée » pour les Européens du XIXème siècle. L’Italie, désireuse de s’octroyer, à moindres frais, une part du gâteau africain, s’intéressait au pays. En 1889, elle signa avec l’Ethiopie le traité d’Ucciali qui fixait les frontières avec l’Erythrée, mais en détourna les
clauses pour tenter de lui imposer son protectorat : c’était compter sans la personnalité de Ménélik II, qui menait une active politique de consolidation -et d’expansion- de l’Ethiopie, appuyée sur l’Eglise chrétienne et sur une armée continûment modernisée. La guerre éclata au début de 1895, qui aboutit à la retentissante défaite des troupes italiennes à Adoua en mars 1896. L’indépendance de l’Ethiopie fut consacrée en octobre de la même année (paix d’Addis-Abeba). Ses frontières avec l’Erythrée et la Somalie furent définies,
en accord avec l’Italie, entre 1897 et 1908. L’entrée en scène de Mussolini sur le théâtre d’Abyssinie en 1935 changea toutefois la donne et mit un terme -provisoire- à la singularité éthiopienne.

PS : pour rester dans les parages de la Corne, signalons, dans la dernière livraison de « Mappemonde », l’article de Jean-Louis Guébourg sur l’ « Etat », non reconnu par l’ONU, du Somaliland.

Thierry Sautier, lycée public Jeanne d’arc, Rouen