Loin du facteur unique des potentialités physiques du vent, l’implantation de projets éoliens est le résultat d’une multiplicité de contraintes.

Projection de 2 cartes :

La carte des gisements éoliens ne correspondant pas aux projets d’implantations. Le Grand-Est est la région en tête avec la Marne et l’Aube, par contre peu en Alsace et dans les Vosges. Inversement la région Paca favorisée naturellement est la plus faible en matière d’implantations (50MW). Il faudra donc chercher des explications autres que naturelles. 

Les conditions naturelles ne sont pas le principal facteur d’implantation

L’analyse portera sur une région, l’ancienne région Champagne-Ardennes.

  • Premier point : cette région a connu un ancrage sectorisé lié en Champagne à l’acceptation des céréaliers. Au départ, c’est le vide juridique qui prévaut concernant la procédure d’installation, l’éolien ayant démarré en France avec beaucoup de retard par rapport à l’Allemagne. A partir de 2000 la réglementation évolue avec les demandes des acteurs locaux et l’adjudication à des promoteurs privés éoliens. Les propriétaires terriens, céréaliers et betteraviers, familiers de la capitalisation foncière et sensibilisés à la diversité des activités, y voient une excellente opportunité.
  • Parallèlement, le secteur privé a été relayé par les politiques locaux et régionaux qui ont appuyé les implantations et favorisé les formations liées à la maintenance type bac +2 pour créer de l’emploi local, car jusque là, étaient embauchés des techniciens recrutés dans les pays plus avancés en la matière. Ont également été associés la Ligue de Protection des oiseaux (LPO) et des associations de protection de l’environnement.
  • Cet ancrage territorial a été également favorisé par une densité faible en Champagne-Ardennes de 50 hab/km2, une condition favorable qui avait déjà permis l’implantation d’infrastructures énergétiques en direction de l’Ile de France : centrales nucléaires, bassins de rétention, stockages de déchets nucléaires… Conséquence, une région que l’on peut qualifier d’« amorphe » en matière de contestations et d’implications citoyennes…

Vers une gouvernance de projets plus citoyens

L’apparition officielle de projets participatifs incite à repenser notre rapport à l’espace. Le développement des EnR (Energies renouvelables) en est affecté. La loi sur la transition écologique et la croissance verte marque une rupture dans la gouvernance de projet. En 2017 il y a obligation d’un appel d’offre pour les projets de plus de 6 mâts.

Or le projet participatif permet l’ouverture du capital notamment pour les communautés de communes (une seule éolienne revient à environ 3M d’€), mais ne donne pas de poids quant à la gouvernance, ce qui favorise de fait  l’adhésion au projet même si les enquêtes publiques ont pu montrer de fortes oppositions.

Les projets citoyens eux, participent aux financements et à la gouvernance de projet. Le 1er projet citoyen éolien-photovoltaïque a eu lieu dans les Ardennes avec une Communauté de communes (94 communes) et l’association EnerCoop (lien) qui souhaite accéder à une autonomie énergétique en relocalisant la production.

Enfin, autre changement notable aux conséquences inattendues : les consultations citoyennes se font également en ligne, parallèlement aux enquêtes d’utilité publique, ce qui a pour effet de donner la parole à des groupes d’opposants plus nécessairement locaux puisqu’ils interviennent quel que soit le lieu d’implantation. Or les commissaires-enquêteurs pour ne pas être court-circuités évitent de les mentionner dans leurs rapports…

Une conclusion qui nous laisse dubitatifs. Si l’évolution juridique de la réglementation concernant les implantations d’éoliennes est bien décrite et montre bien une professionnalisation du secteur, que dire du 2nd point qui nous paraît loin de rendre compte du thème « une implantation raisonnée est-elle possible ? ». Quid des opposants et de leurs arguments dont on sait qu’ils sont nombreux et divers ? A la question posée par le public, la conférencière en distingue deux types : les « idéologiques » et les « de droite »… On aurait aussi aimé en savoir un peu plus long sur les réticences « techniques » : bruit généré, faible rapport énergétique dû à l’intermittence et surtout aux opérations de maintenance, atteintes à l’environnement et aux paysages notamment dans des régions touristiques, etc. Enfin, le parti pris de répondre aux questions que soulevait le thème par le biais de la seule région Champagne-Ardennes pouvait-il être représentatif de la situation nationale ?

Jean-Michel Crosnier pour les Clionautes