Une belle exposition qui réunit les planches originales de cette série publiée en 1799 et retirée de la vente sous la pression de l’inquisition et des « caprices contemporains » où se retrouvent le photographe Yasumasa Murimora et les graveurs Jake et Dinos Chapman

On savait déjà que le musée des beaux arts de Lille partageait avec ceux de Castres et du Prado le privilège de posséder dans ses collections des œuvres majeures de ce peintre et graveur qui a sans doute été celui qui a le plus contribué à faire passer les arts plastiques dans la modernité du XIX et du XXe siècle. Dans son Sa tarjectoire est de ce point de vue exemplaire. Peintre de Cour, portraitiste majeur, il voit sa vie basculer tout comme Beethoven et devient sourd en 1792. (Beethoven vers 1800).
En 1798, il grave les Caprices, synonyme de fantaisies, et développe trois thèmes récurrents par la suite dans ses peintures.
La satire sociale, impitoyable avec une dénonciation de l’hypocrisie du Clergé espagnol qui llui vaut les foudres de la Sainte Inquisition. (Qui est un organe de l’État)
La sorcellerie, avec en filigrane une dénonciation des superstitions religieuses
une relation ambivalente entre la mort et les rapports amoureux.

Dans ses gravures de 1798, on devine déjà la maîtrise de la représentation des mouvements, qui sera la plus achevée dans ses tauromachies qu’il grave en 1814.

La planche 14 reproduite ici évoque par exemple les mariages arrangés, la concupiscence des puissants qui dénaturent l’amour mais aussi la façon dont les femmes se livrent par intérêt aux appétits des hommes. De ce point de vue Goya est aussi très moralisateur. il a peut-être une certaione compréhension pour les prostituées qu’il considère comme des victimes, même s’il évoque aussi leurs clients comme des moutons qui se font tondre.

Il y aurait bien d’autres choses à dire sur cette exposition, et notamment sur l’aspiration de Goya à un monde organisé par la raison dans une Espagne qui s’attarde encore dans l’irrationnel. Il avait d’ailleurs prévu de mettre dans le frontispice e ses caprices une gravure intitulée «El sueno de la razon produce monstruos», un bel hommage à l’esprit des lumières. À ce propos, Goya n’avait pas forcément de tendresse pour la famille Royale espagnole chassée du trône par Napoléon mais en même temps, il n’acceptait pas la brutalité de l’occupation militaire française. Il quitte d’ailleurs la péninsule en 1824, fuyant la répression consécutive à la restauration des Bourbons d’Espagne pour se réfugier en France.

Sa relation à la création se mène sur le terrain du défi, une aspiration qui se retrouve dans le texte de Fred Licht cité dans le lien ci-dessous.

Une belle présentation du rôle de l’artiste sur le site d’un lycée de Grenoble
http://www.ac-grenoble.fr/lycee/vincent.indy/spip.php?article274