Cette table ronde à 7 intervenants en une heure et demie, cela s’annonçait mal! En fait, on assiste surtout à un DUEL entre Cécile DUFLOT, la dirigeante politique écologiste et Patrick ARTUS, économiste libéral. Ils ne semblent pas d’accord du tout sur le futur du capitalisme… Étonnant, non ?

Introduction : 

Le capitalisme ne peut plus continuer comme avant avec la crise financière, la montée des inégalités et la transition écologique urgente. Quel est donc l’avenir du Capitalisme ?

PREMIER INTERVENANT : Patrick Artus.

Le Capitalisme a produit ce que l’on attendait de lui jusqu’à une période récente, surtout pour les actionnaires, et a mené à une élévation du niveau de vie. Les pauvres sont passés de 25% à 4%.On est en train de changer les objectifs du capitalisme.

La montée des inégalités en Europe se combine avec une baisse de la pauvreté dans le monde. Il y a un lien entre inégalités et innovation, comme le montre Thomas Piketty.

Notre modèle économique est goulu en énergie. Il faut ajouter deux contraintes au capitalisme : la montée des inégalités et le défi écologique. Comment organiser le retour de la production en Europe?

Sur l’écologie, il faut redéfinir les rôles respectifs de l’État, des Entreprises et de la Finance. Quelle efficacité pour le prix du CO2?

DEUXIÈME INTERVENANTE : Cécile Duflot.

Le Capitalisme n’a pas d’objectifs mais un but : la recherche du PROFIT. C’est l’État qui l’a encadré en lui fixant des objectifs! Quand il ne l’a plus été…

Le Capitalisme est incapable de réfléchir au long terme. En 2019, 26 milliardaires ont le patrimoine de 50% de l’humanité. Sans régulation externe, le Capitalisme devient fou.

Depuis 2007, les banques françaises ont moins investi dans le renouvelable et les grands banquiers acquièrent des propriétés en Norvège.

TROISIEME INTERVENANT : Xavier Ragot, président de l’OFCE, Observatoire Français des Conjectures économiques.

Vers 1980, le Capitalisme intègre la question sociale, avec l’affirmation de l’État-Providence, au moment où la Chine entre dans le néo-libéralisme avec Deng Xiaoping. C’est un DOUBLE TOURNANT du Capitalisme !

En décembre 1991, l’URSS s’écroule et on assiste à l’extension du domaine du marché, alors que les forces du marché se sont avérées profondément déstructurantes. L’Europe se réunifie en 2004.

En 2019, la politique est de retour : l’État est présent et l’économie est utilisée comme instrument de puissance mais il a le visage du NATIONALISME avec Donald Trump et Xi Jinping.

La question écologique est l’équivalent de la question sociale au XIXème siècle; mais est-ce que les Américains veulent ce changement? L’État-providence n’est pas né au sein de l’État, mais dans la société civile; c’est à la société civile d’imposer les changements écologiques.

Qui va gagner entre la main gauche et la main droite de l’État ?

QUATRIÈME INTERVENANTE : Isabelle Ferreras de l’Université de Louvain.

La question du capitalisme se pose à l’échelle de l’entreprise. Il y a CONTRADICTION entre Capitalisme et Démocratie : à qui accorder des droits politiques, aux capitalistes ou à tous?

 

Soit le capitalisme se renforce comme régime de gouvernement : aux Etats-Unis, règne le DESPOTISME du Capitalisme, en faisant le jeu des SEULS PLUS RICHES…

Soit on renforce la démocratie et donc le pouvoir d’agir sur sa vie.

Les entreprises ont été organisées en fonction des intérêts du capital et non du travail, et elles ne peuvent servir les intérêts de la démocratie. Les travailleurs ne sont pas en position de gouverner les entreprises.

CINQUIÈME INTERVENANT : Pierre-Noël Giraud, économiste français.

Quelles devraient être les priorités d’un capitalisme humaniste?

Le critère implicite du capitalisme libéral était de lutter contre l’extrême pauvreté car chacun doit avoir les opportunités d’améliorer son sort économique. Or, en France, il y a des « hommes inutiles » : il y a un indice d’inutilité qui monte depuis les années 1980; il faut sortir des trappes les « inutiles ».

L’autre extrême, c’est ceux qui ont bénéficié de situations de monopoles et qui sont les ont méga-enrichis.

Solution : la taxation? Il faut organiser le reversement de ces taxes à des fondations ayant des objectifs publics. Il faut la même taxation pour le Capital et pour le Travail!

DERNIER INTERVENANT : Jean-Paul Pollin, professeur à l’Université d’Orléans.

Quelles sont les solutions macro-économiques ?

Sur le constat, il y a un très grand consensus depuis Stiglitz, sur les explications aussi, progrès techniques et mondialisation; mais PAS sur les SOLUTIONS !

 

1) l’hyperglobalisation : il faudrait compenser pour les perdants. Or, les coûts de compensation deviennent supérieurs aux gains. Le multilatéralisme est mort. On n’a pas de gouvernance mondiale pour l’écologie, notre bien commun. Sortir de la mondialisation, notamment financière, par l’évasion fiscale qui remet en cause l’indépendance des politiques…

2) Restauration du rôle de l’Etat : la redistribution pose problème; l’importantm c’est l’investissement public. Or, l’État transfère plutôt que d’investir.

3) L’entreprise : l’Etat ne peut être le seul porteur du bien commun. Il faut sortir de l’entreprise anglo-saxonne et promouvoir l’actionnariat salarié plutôt que les fonds de pension.

4) Démocratie et Capitalisme ont eu partie liée : il faut le retour de l’ÉTAT-NATION !