Dans le cadre des rencontres archéologiques de Narbonne, co-organisées par les Clionautes (merci Richard Andrieux !), un documentaire court sur les onze églises rupestres de Lalibela, la « Jérusalem Noire » a été présenté. Il fait partie de la série visible sur Arte « Enquêtes archéologiques ». Le principe est le suivant : un archéologue, en l’occurrence le belge Peter Eeckout de l’université libre de Bruxelles, se rend sur un chantier et y discute avec le directeur des fouilles. Les églises rupestres de Lalibela se trouvent en Éthiopie, pas loin du mont Abuna Yosef. Ce sont des églises chrétiennes orthodoxes, supposées avoir été construites par le roi Gabra Masqal Lalibela (1190-122). Leur originalité est d’êtres taillées dans le roc à partir du sommet, et sont donc enfouies dans le sol et sont donc, techniquement parlant, de parfaits monolithes. Aucun rajout de pierre extérieur n’a été apporté. Marie-Laure Derat, qui dirige la mission archéologique, explique que cela implique quelque chose d’inhabituel pour un archéologue. En effet si, de façon classique, comme à Troie par exemple, plus on creuse profond, plus c’est ancien, dans le cas de Lalibela ce sont les couches les plus supérieures qui sont les plus anciennes. Il faut donc fouiller dans les remblais autour des églises pour trouver des indices sur la date exacte des travaux. Des travaux qui, en fait, se déroulent avec des à coups du XIIème au XVIème siècle, avec un pic entre le XIIème et le XIIIème. Les datations au carbone 14 faites par l’équipe de Marie-Laure Derat, et notamment dans les débris d’excavations, ainsi que des documents écrits permettent d’attester que le rôle joué par Gabra Masqal n’est pas uniquement légendaire, même si les chantiers se poursuivent après sa mort. Le tombeau du roi se trouve d’ailleurs au cœur de l’église de Béte Mikaél (Saint Michael) mais n’est pas visible pour le commun des mortels, et encore moins pour les femmes, ce qui rappelle les règles orthodoxes du mont Athos en Grèce.
Archéologiquement parlant, on est frappé par la masse d’excavation nécessaire, mais aussi, notamment pour l’église Béte Gyorgis (Saint Georges), du travail en continu. En effet non seulement les murs de l’église, mais aussi son intérieur, son décor, est réalisé au fur et à mesure des excavations dans une terre difficile qui se transforme en boue quand il pleut. Les églises de Lalibela, inscrites au patrimoine mondial de l’humanité en 1978, sont d’ailleurs aujourd’hui protégées de la pluie par de grandes bâches blanches suspendues. Le documentaire est visible en replay sur le site d’Arte.

Mathieu Souyris
Lycée Paul Sabatier, Carcassonne