Deux conférenciers pour deux approches bien différentes.

Julien Ayme est professeur à l’IEP Paris est un spécialiste d’intelligence économique au sein du GEFYRA, un cabinet de conseil expert des organisations internationales et du continent africain.

Florent BLANC est un spécialiste des questions de contre-terrorisme, diplômé de Sciences-Po Paris et de Northwestern University. Il est chef de projet Mali à l’École de la paix.

Enjeux sécuritaires

Julien Ayme définit en quoi la géopolitique est indispensable aux entreprises qui souhaitent intervenir en Afrique et tout spécialement au Sahel qu’il inclut dans un espace géographique plus large sahelo-saharien.
Il rappelle que cet espace est depuis des siècles traversé par des routes commerciales (or, sel, esclaves) lesquelles demeurent aujourd’hui le lieu de trafics (drogue, armes, migrants mais aussi cigarettes et même pâtes alimentaires en 2008 pendant la crise des céréales).

C’est aussi un espace où vivent de nombreux groupes ethnolinguistiques, situation défavorable à la structuration d’États-nations par exemple le clivage Nord-Sud au Mali.

Ces clivages sont facteurs de conflits, l’état étant perçu comme illégitime, héritier de vielles oppressions (du Nord sur le Sud : Soudan, Mauritanie ou l’inverse Mali).

Il est alors difficile de contrôler de très vastes territoires marqués par des antagonismes historiques, culturels, religieux, aggravés par des concurrences pour l’accès aux ressources et dans un contexte de croissance démographique. La prolongation des courbes actuelles de taux de natalité étant annoncée comme prédictive sans nuance.

Le Sahel est une zone de pauvreté et donc d’exode rural et de flux migratoires sur fond de changement climatique. La vision afro-pessimiste du conférencier l’amène à affirmer que pour les jeunes il n’a que deux mirages : l’Europe et le Jihad.

Il revient sur ce qu’il nomme l’arc des crises de la Somalie au territoire sahraoui, rendu plus instable encore depuis la chute de la Libye et le développement de groupes islamiques maffieux.

L’opération Serval suivie du dispositif Barkhane ont certes stabilisé la zone mais ne peuvent traiter les causes des conflits pourtant une stabilisation du Sahel est indispensable

Paix territoriale

Face à un exposé globalement pessimiste Florent Blanc de l’École de la paix propose en changeant de regard un projet ambitieux de paix territoriale. A la géopolitique du Mali, vision externe il préfère une géopolitique malienne, interne donc.

Pourquoi des crises au Mali et comment les régler de façon non violente.

Les causes des conflits au Mali et en Afrique de l’ouest en général peuvent se ranger en cinq domaines : les facteurs liés à la faiblesse des institutions, à la capacité de protéger, à la fragilité des environnements, à l’économie et enfin aux relations sociales.

L’idée est une analyse de la crise pour éviter sa reproduction et met en avant la notion de gouvernance : Qui gouverne au nom de qui ? Pour quels intérêts ?

Depuis 2011 on assiste à des opérations militaires, une guérilla, des accrochages, du terrorisme. Quelques que soient les termes employés c’est une situation d’insécurité constante à réduire pour le Mali (déséquilibres) et pour l’Europe (contrôle des flux migratoires, lutte contre le terrorisme).

L’analyse des faits de violence en montre les caractères divers, pas toujours à l’initiative des islamistes.

Les mécanismes de la crise :
Des causes : les fragilités des écosystèmes, du lien social, des fragilités économiques, institutionnelles, une difficulté pour l’État malien à protéger les populations.

Le conférencier montre un outil d’observation multicritères très intéressant.

Cette grille d’analyse s’appuie sur le suivi de 5 domaines de tension, détaillés à 3 niveaux d’amplitude et permet une cartographie Présentation : http://territoires.ecoledelapaix.org/grille-danalyse-des-tensions.
On peut en retrouver des éléments dans le bilan 2015 de l’action de l’association au Mali CONSTRUIRE LA PAIX BILAN 2015 [http://www.resacoop.org/sites/default/files/pdf-reseau-paix-droits-humain-et-coop/ResauPaix_Ecoledelapaix_BilanMali2015.pdf->http://www.resacoop.org/sites/default/files/pdf-reseau-paix-droits-humain-et-coop/ResauPaix_Ecoledelapaix_BilanMali2015.pdf
].

Il en montre l’usage, hélas trop rapidement, à propos du retour des réfugiés dans la zone de Tombouctou où récemment ils ont été victimes de violence de la part d’autres habitants de la ville On peut se faire une idée de cet outil[ http://territoires.ecoledelapaix.org/analyses/analyse-hebdomadaire-des-tensions-au-mali-semaine-du-13-au-17-avril-2015->http://territoires.ecoledelapaix.org/analyses/analyse-hebdomadaire-des-tensions-au-mali-semaine-du-13-au-17-avril-2015]

En conclusion il s’interroge à propos des récents accords de paix : La décentralisation est une solution ?
L’enjeu est bien évidement le partage de la capacité de décider localement, en tissant un maillage institutionnel cohérent et respectueux des particularismes locaux (histoires, traditions, composition démo, enjeux propres …).