Lors de son discours aux Assises de la mer dans la ville du Havre en novembre 2017, le Premier ministre a évoqué le passé maritime de la France. Puis il a rappelé les incohérences des politiques successives de la mer depuis plusieurs centaines d’années avant de présenter le programme du quinquennat Macron en la matière : développement portuaire homogène et concerté , transition énergétique marine accélérée, maintien sous pavillon national d’une flotte marchande stratégique, préservation de l’intégrité du territoire maritime français.

Devant un parterre de 1800 acteurs du monde maritime réunis à l’occasion des Assises de la mer, le premier ministre Edouard Philippe a exposé la stratégie maritime du quinquennat Macron.

La France, une nation maritime par intermittence

Edouard Philippe évoque « l’oubli volontaire ou involontaire par la France de sa vocation maritime. » Et de préciser que si « cet oubli est excusable, il est le premier d’une longue série. Pour un Choiseul, un Colbert, un Richelieu, un louis XIV, un de Gaulle, combien d’intermittences du cœur, combien d’années sans vent dans les voiles ? » Le premier ministre déplore ainsi les errements successifs des politiques navales depuis plusieurs siècles et rappelle le le caractère éminemment maritime de la France, trop souvent négligé.


Il n’y a cependant pas de fatalité. Et de citer l’exemple du Havre, une ville portuaire née de la pure volonté politique dans un cadre géographique hostile. Un port dont « la mer est la raison d’être. »

« Souvent les gouvernent disent que la mer est importante. Mais ils le disent et le pensent tard trop »

Le Premier ministre résume « Nous avons donc 5 ans devant nous et en 5 ans on peut rattraper le retard et même prendre de l’avance »

Les défis des ports français

Partant du constat que « la France n’a pas un trafic maritime à la hauteur de sa façade maritime, de son marché intérieur et de sa place en Europe », Edouard Philippe propose de s’atteler aux défis relatifs à l’aménagement du territoire maritime.
Au-delà de la simple déclaration d’intention, l’ancien maire du Havre s’est de la sorte fait le chantre d’une stratégie portuaire articulée autour de trois axes.

assurer la complémentarité des ports français et en finir avec leur rivalité « Je veux un seul port français à 3 portes entrées » professe Edouard Philippe. Le système de l’axe Seine et ses 3 ports Paris Rouen Le Havre doit être renforcé en favorisant la complémentarité de chaque port. Celui de Marseille doit pénétrer davantage dans les terres, vers Lyon le long de l’axe Rhône. Dunkerque enfin à proximité des grands ports belge set néerlandais doit être notre tête de pont sur l’axe nord.
Ces réorganisations ont pour objet de transformer les ports en écosystèmes et non en seuls gestionnaires des flux. De là l’interrogation sur la nature de la délégation d’autorité et de la tutelle administrative sur les ports français.

assurer la compétitivité des ports : les ports sont des centres de services capables d’attirer les investisseurs. Il faut donner de la visibilité sur leurs charges fiscales et étudier leur domanialité.

augmenter la fluidité du transit portuaire : les ports ont besoin de communiquer aisément avec l’ arrière-pays.. Il faut donc les relier à l’Hinterland par des liaisons ferroviaires et fluviales. L’Etat doit soutenir le transport combiné. Les ports ont enfin besoin de fluidité numérique et de digitalisation de la logistique maritime sur le modèle Singapourien ( deux plateformes numériques devraient être fondues en une seule)

L’avenir des ports se déroule aussi dans les Outre-mers : emploi des jeunes ultra marins favorisés et développement des plateformes de transbordement aux Antilles.

Edouard Philippe conclut: les ports français doivent demain être les ports de l’Europe.

La mer, enjeu du XXI siècle est un atout énergétique et environnemental

La mer recèle les énergies de demain. En ce sens, la France se veut « espace de transition énergétique maritime » adossé à la mer Elle tend donc à en premier lieu à substituer pour ses navires les carburants très polluants par l’emploi de GNL. Des compagnies éminentes se sont déjà converties en partie à ce carburant : Brittany Ferries ou CMA CGM.
La France assume en outre un rôle de leader dans la lutte contre le changement climatique. Elle tente en effet d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Le gouvernement demande par OMI le classement de la Méditerranée en zone de basse émission de polluants.
Dans ce sens, la majorité gouvernementale se bat pour que la recherche et ‘exploitation des hydrocarbures soit interdite dans les territoires maritimes de la France. D’autre part en développant les énergies renouvelables. Un pari difficile à tenir. La France s’est laissé distancer dans ce domaine. « Nous essayons de rattraper le retard des énergies renouvelables (…) » Un constat cependant : « La transition énergétique n’a pas été bien entamée. Pour y remédier, les procédures d’évaluation des projets et des parcs marins d’énergies renouvelables seront simplifiées. » Dès 2018 seront lancées les étude préalables des les futurs appels d’offre sur l’ éolien flottant en Bretagne et en Méditerranée. Pour gérer les conflits d’usages, les préfets devront mettre en œuvre la planification spatiale et stratégique des espaces maritimes.

La France possède enfin une richesse unique : ce second espace maritime mondial récèle 10% des espèces marines de la planète. Elle est comptable de cette biodiversité et se doit de la protéger.
C’est pour cela qu’une politique d’exploration des grands fonds sera menée, au frais de l‘Etat
La lutte contre la pêche illégale sera accrue. Même si aujourd’hui,« la pêche française va mieux « , La France doit rester vigilante, notamment en raison du Brexit.  » La France sera intraitable pour faire valoir nos antériorités de pêche conformément au droit international  » a menacé le Premier ministre.
Pour mener ces combats, des moyens seront alloués : navires versés dans une flotte stratégique, drones de surveillances et des moyens financiers à la hauteur. Edouard Philippe appelle ainsi à la constitution d’un modèle industriel maritime identique à ceux de l’aérospatial ou de l’aérien, assisté par l’Etat.

Une flotte marchande française à développer


Le Premier ministre défend le maintien et le développement d’une flotte marchande sous pavillon national. « Pour aider notre marine marchande, j’ai souhaité maintenir les exonérations de charges pour les armateurs votées en 2016 et qu’elles soient maintenues durablement, a prévenu le chef du gouvernement. Parce qu’il y a là aussi, plus qu’un simple enjeu commercial, un enjeu de souveraineté (…). Nous développerons, durant les trois prochaines années, notre flotte stratégique, c’est-à-dire que nous maintiendrons une flotte sous pavillon national et des marins français pour les activités qui relèvent de notre souveraineté et des situations de crise « . Et de conclure par voie de conséquence par la nécessité de préserver en parallèle un autre patrimoine national qui touche au monde de la mer: la signalisation maritime de nos littoraux.

Le nautisme enfin, un secteur économique sous-évalué doit être audité afin de connaître son poids économique et comprendre les modalités de son développement.

Edouard Philippe termine sur des indicateurs de réussite du projet maritime français par une anaphore : « nous aurons réussi quand disons 70 % des habits, des objets, des matériaux que nous utilisons au quotidien auront transité par un port français. Nous aurons réussi quand le soir, les Normands, les Bretons le soir, s’éclaireront avec une énergie qui viendra de leur horizon,
Nous aurons réussi quand le développement de notre économie maritime sera 100% compatible avec le fonctionnement des océans. Nous aurons réussi quand dans tous les lycées de France, les métiers de la mer apparaîtront comme un avenir tout à fait naturel et accessible. Nous aurons réussi quand la France ne se définira plus comme des terres continentales et insulaire s entourées de mers mais comme une terre, une seule et même terre de France entourant toutes les mers
»