Il s’agit d’une conférence donnée par Georges Courade, qui a dirigé l’ouvrage « l’Afrique des idées reçues ». Elle a été donnée le Jeudi 16 novembre 2006 lors d’une journée de formation continue. Elle est ici reproduite dans ses grandes lignes avec l’autorisation de l’intéressé.
Par Cyril Froidure,

Lors de cette journée de formation à Amiens sur l’Afrique, Georges Courade a présenté un exposé d’un peu plus d’une heure et demie sur le problème de la faim en Afrique subsaharienne.

Cette conférence s’articulait autour de 6 points:
l’importance du choc des photos pour nous autres occidentaux,
les déterminants de la sécurité alimentaire,
les points sensibles de la sécurité alimentaire,
les idées reçues sur l’agriculture familiale,
les idées reçues sur la faim
et comment réduire la vulnérabilité.

L’intervenant a commencé son propos en projetant des photos tirées du site d’Action contre la Faim en soulignant la stratégie de cette ONG, et des ONG en général: montrer des images chocs pour déverrouiller les portes-feuilles. Il convient de la nécessité de l’intervention des ONG mais insiste sur le fait que celles-ci travaillent sur le court terme et donc ne luttent pas durablement contre les causes des catastrophes humanitaires touchant l’Afrique subsaharienne.

Dans un deuxième temps, il est revenu sur une série de définitions distinguant sécurité alimentaire, insécurité alimentaire, vulnérabilité…
La sécurité alimentaire serait difficile à définir car dépendant des critères retenus mais il suggère qu’il s’agit d’une situation où l’alimentation est présente en quantité suffisante, est nutritive, qu’elle correspond à des préférences alimentaires. L’insécurité alimentaire, elle, correspondrait à une indisponibilité physique de vivres mais aussi à une utilisation inadéquate des aliments, d’une difficulté à accéder aux vivres (le cas de l’accès social au repas collectif en Afrique). Les symptômes en sont des carences énergétiques, nutritionnelles.

Plusieurs explications ont été convoquées pour comprendre cette insécurité: une explication malthusienne, une thèse agronomique (pas assez de production), un problème de répartition des vivres, les carences étatiques. Pour clore cette 2ème partie, Georges Courade indique que l’Afrique connaît aussi des problèmes de surcharges pondérales.

Ensuite, il aborde les points sensibles de la géographie de la sécurité alimentaire. Il existe des points vulnérables (bande sahélienne) car le temps de production y est faible, les densités sont élevées, les terroirs sont saturés (pays Ibo du Nigéria)… Ici, il précise en faisant le rapport entre terre cultivée et terre cultivable: certains pays sont à saturation (Burundi), d’autres ont entre les deux un rapport faible (RDC). L’intensification est une réponse possible mais il existe des risques: climatiques, phytosanitaires, économiques (rémunération trop faible pour les paysans).

Les deux parties suivantes utilisent le procédé de la remise en cause des idées reçues.

D’abord celle sur l’agriculture familiale: elle serait archaïque, travail serait manuel, concurrencée par les cultures de rente. Georges Courade cite des exemples d’archaïsme (peu d’intrants) mais évoque des révolutions agricoles invisibles (association végétale contre les pertes de fertilité, le travail léger du sol plutôt qu’un labour profond).

Autres idées reçues: celles sur la faim. Il faudrait coloniser des terres neuves: il existe des terres peu occupées comme le Middle belt nigerian, le Kivu mais celles-ci ne sont pas forcément utilisables. L’irrigation serait la solution, thèse mise en avant par Pierre Gourou or actuellement seulement 3,3% des terres sont irriguées, un constat d’échec a été fait pour les grands périmètres (problème d’entretien, main d’œuvre importée) alors que les petits périmètres tirent leur épingle du jeu.

Enfin, la solution miracle:les OGM. De ceux-ci étaient attendus une production avec peu d’intrants, des productions dans des zones à saison végétative courte; les résultats sont décevants: le coût des semences est élevé, des menaces sur la biodiversité ont été mises en évidence, elles sont inadaptées à l’agriculture familiale.

Cette intervention s’est achevée sur la réduction de la vulnérabilité. L’auteur avance plusieurs solutions: l’importance de l’agriculture familiale qu’il décrit comme étant une agriculture post-moderne, la richesse de l’agroforesterie (synergie plantes/arbres), la polyculture, le travail à minima du sol.

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