FIG 2013: L’essor spectaculaire du trafic conteneurisé des ports chinois dans son contexte mondial et régional.

Après les présentations faites avec beaucoup d’humour et de compréhension pour un auditoire déjà passé par 4, 5 conférences, tables rondes, présentations d’ouvrage, J. Charlier commence en annonçant son plan, ses données et ses sources. Celles-ci sont actualisées (2009, 2011 et 2012) et proviennent de revues spécialisées (Conteneurisation International et Container Management) de Mappemonde, des sites internet des ports, de l’ISEMAR (diverses Notes de synthèse). Elles portent systématiquement sur les vingt dernières années et sont exprimées en EVP ou TEU (twenty equivalent units).

L’auteur nous questionne tout d’abord sur le/les conteneur(s). Des boîtes ISO de 10, 20, 30 ou 40 pieds ? C’est selon. On a vu des conteneurs de 45 pieds et même de 53 pieds plus récemment (aux Etats-Unis). Mais le conteneur standard c’est celui de 20 pieds (EVP= équivalent vingt pieds) auquel tout est ramené.

Pour détendre l’atmosphère, J. Charlier précise qu’il est spécialiste des por(t)s et non des des por(c)s !… Il poursuit son introduction sur l’historique de la conteneurisation. Tout a commencé en 1956 avec la première compagnie Sea-Land (qui devient Sealand en suite). S’ensuit une course aux économies d’échelle et d’envergure. On passe ainsi d’un cargo de 135M, avec un tirant d’eau inférieur à 9m emportant 500 conteneurs (1956/1960) au porte-conteneur de type Panamax (1980/1988) de 250m de long qui embarquait 3000 conteneurs, au new Panamax de 2006, long de 397m, ayant un tirant d’eau de 16m et emportant 11 à 14000 conteneurs ! Les plus gros porte-conteneurs au monde en 2013 sont des 18400 EVP (longueur 400m largeur 59m, 16m de tirant d’eau qui ont un port en lourd de 165000 t. En plaisantant , J. Charlier ajoute que ces mastodontes transportent parfois en majeure partie de l’air….en mer !

Notre conférencier rappelle ensuite l’article pionnier de son collègue nantais J. Marcadon, paru dans Mappemonde en 01/1995 : « ports et flux de conteneurs dans le monde, 1983/92 ». Et nous donne le classement actuel des plus grands armements conteneurisés au monde (source www.alphaliner.com/top100/):

  • 1°) APM- Maersk, armement danois, 15%
  • 2°) MSC (Mediterranean Shipping Company Italie) 13,5%
  • 3°) CMA-CGM (français et britannique) 8,5%
  • 4°) Evergreen Line (Taïwan) 4 ,7%
  • 5°) COSCO Container Limited (Chinois) 4,4%
  • Puis J. Charlier nous propose 3 séries de 6 cartes inédites, spécialement préparées pour le FIG 2013 et réalisées de 4 en 4 ans entre 1992 et 2012, après avoir souligné l’extraordinaire croissance de la conteneurisation de 1970 à nos jours au moyen d’un graphique. Pourquoi 1992 ? Aucun port chinois n’avait alors un tonnage significatif, même Shangaï ne totalisait que 0,7 million d’EVP. Le conteneur est bien le 1er objet/instrument de la mondialisation !
    Les tableaux comparatifs et les planisphères associés du « top 10 du trafic mondial de conteneurs » entre 1992 et 2012 (en millions d’EVP) est éloquent :
  • 1992 2012
  • Hong Kong 7,9 Shangaï 32,6
  • Singapore 5,2 Singapore 31,7
  • Rotterdam 4,13 Hong Kong 23,1
  • San Pedro Bay (LA+Long Beach) 4,1 Shenzen (port « low coast ») 23
  • Kaohsiung 3,5 Ningbo-Zhoushan 16,8
  • Keihin Ports 3,2 Guangzhou 14,7
  • Hanshin Ports 3,04 Qingdao 14,5
  • Hambourg 2,27 San Pedro Bay 14,1
  • New York 2 Dubaï (1er port iranien !) 13,3

Ces chiffres, ces places, rangs sont très significatifs. On peut voir que 7 des 10 plus grands ports à conteneurs en 2012 sont asiatiques contre 6 seulement en 1992 ( Keihin et Hanshan Ports étant des groupes de ports japonais) et même 4 si l’on exclut les ports japonais de ce classement. Et plus encore, 6 des 8 plus grands ports à conteneurs au monde sont aujourd’hui chinois ! Contre zéro ou 1 (si l’on compte Hong Kong comme port chinois) en 1992 !

On voit sur les cartes, par la confrontation, l’évolution phénoménale des ports d’Asie de l’Est et du Sud Est distinctement entre 1992 et 2012. Dubai devient une vraie plaque tournante qui remplace pour partie l’occident européen. De même en Europe, on est passé de la « Northern Range » à la « Southern Range » en Méditerranée avec l’ensemble qui s’étend de « Tanger Med » port « low coast » marocain et Gibraltar jusqu’au Pirée où le chinois Cosco vient d’investir 3,3 milliards de $:
http://www.presseurop.eu/fr/content/article/289631-le-piree-porte-dentree-de-la-chine-en-europe

La carte des ports de la façade asiatique devient illisible dès 2004, tant leur nombre et leur trafic augmentent. Le Proche-Orient apparaît avec des ports comme Damiette, Port-Saïd, Haïfa ou Beyrouth. Pendant ce temps le trafic des ports européens croît de plus en plus lentement avant de stagner en 2008, voire de reculer (2012) parfois. Cette nouvelle géographie des ports va au-delà. Ainsi, la Thailande envisage de doubler le détroit de Malacca par un grand canal au travers de l’isthme de Kra, comme le Nicaragua qui songe à construire sur son sol un nouveau canal pour doubler celui de Panama. Là aussi existent des ports « lower cost » qui doublent les ports plus anciens. Ainsi Tanjung Telepas (le port miroir malaisien de Singapour) passe de 0 en 1992 à 7,7 millions de t en 2012 ! D’ailleurs Singapour mécontente d’avoir été dépassée par Shanghaï , songe à étendre son port pour reprendre sa 1ère place !

De même au Moyen-Orient les ports croissent avec l’essor des ports chinois et de la conteneurisation. On y voit aussi des nouveaux ports comme « Port Khalifa » à Abu Dhabi, dans l’ombre de Dubai, qui veut atteindre prochainement 25 millions d’EVP en trafic de conteneurs. Un projet à la chinoise, tout simplement ! J. Charlier nous montre les photos de ce port en construction (KPIZ), qui viendra concurrencer celui de Dubai (à côté duquel est prévu un grand aéroport pour le fret).
Notre conférencier termine son exposé «  express » par un découpage intéressant et un classement en termes de croissance des trafics des ports de la « Grande Chine ». Ainsi il distingue :

  • 1/ les ports du Nord-Est de la Chine (ou de la baie du Bohai) (qui bénéficient des délocalisation de la Corée du Sud)
  • 2/ Les ports de la partie centrale de la Côte (Shangaï)
  • 3) Les ports de Taîwan et de la province du Fujian (Taïwan délocalise en Chine aussi)
  • 4) les ports de la rivière des perles.

Il en ressort que l’évolution des ports de la « partie centrale de la Côte » connait la plus forte croissance , le trafic de 2012 est de 63 fois plus élevé que celui de 1992 . Suivent les trafics des ports du Nord-Est (x 60) celui de la rivière des perles (8 fois) et celui de Taïwan/Fujian (5 fois). Les opérateurs de Singapour investissent partout, comme ceux de Taïwan. Et la croissance des ports de Qingdao ou de Ningbo est absolument phénoménale (passant de 0,4 à 12,2millions de t et de 0 à 17millions de t entre 1992 et 2012 !

J. Charlier finit par l’historique du port de Shanghaï, avec de belles diapos : tout a commencé sur le « Bund » le trafic conteneurisé a ensuite migré vers Pudong et a aujourd’hui partiellement glissé vers le port en eau profonde de Yanshian (30km en mer, plus de 6 km de quais un trafic de capacité 25 millions d’EVP).
En conclusion notre conférencier insiste pour dire que si Shanghaï est bien le 1er port du monde pour la trafic conteneurisé, c’est Shenzhen/Guangzhou sur la rivière des Perles et Hong Kong qui est le 1er pôle portuaire mondial ! En principe…….. car à Hongg Kong, Shenzen et Guangzhou, on compte parfois en double (conteneurs arrivant par mer et repartant sur les barges !!.)

Au total un exposé clair, actualisé, vivant et riche. L’humour et les clins d’œil du conférencier en prime, largement apprécié par l’auditoire et votre ….serviteur.