Robots, capteurs, génotypages…l’agriculture 3.0 bouleversent les campagnes et les modes de production. Les paysans d’hier deviennent-ils des « aggekulteurs » ? Avec quelles conséquences ?

Intervenante Sylvie Brunel, professeur à l’université Paris IV-Sorbonne, présente ici son nouvel ouvrage: Plaidoyer pour nos agriculteurs chez Buchet-Chastel.

Sylvie Brunel rappelle qu’elle aime intervenir chaque année à Blois et intègre son propos dans le 20ème Rendez-Vous de 2017, consacré au progrès et à l’innovation.

« Les campagnes sont le levier essentiel de l’économie mondiale car, malgré la haute technologie actuelle, le premier des besoins reste celui de la sécurité alimentaire. Dans Le Monde, daté du 6 octobre, on constate le retour de la faim. En ce moment, se tiennent les États généraux de l’alimentation avec la question du statut des agriculteurs, de leur rémunération et de leurs difficultés. Or, le secteur agricole est un secteur en crise mais il reste vital et stratégique. Les inquiétudes sont aussi très importantes au sujet de l’alimentation. »

Sylvie Brunel rappelle ensuite son parcours : venant de l’humanitaire « c’est-à-dire des crises alimentaires », elle a travaillé cinq ans avec Médecins sans Frontières et 12 ans à Actions contre la Faim, pour montrer que la réalité de la faim reste majeure.

« Les 800 millions de personnes qui souffrent de la faim et de malnutrition sont une conséquence de la pauvreté rurale, alors que deux tiers de la population mondiale est rurale. Un milliard de paysans travaille avec des outils rudimentaires et vit dans la crainte des mauvaises récoltes. En Afrique par exemple, le système agricole est gourmand en terres cultivables, notamment avec le principe de l’agriculture sur brûlis qui ne peut être viable que tant qu’il est adapté à de faibles densités de populations. Or, aujourd’hui l’augmentation de la productivité pose problème. Elle se fait par la déforestation mais les filières agricoles sont à moderniser et globalement, elles souffrent d’un manque d’outils, de diversification et de reconnaissance. L’exemple du Sénégal est parlant. Les vaches sont importées car les croissants besoins en lait ne sont pas couverts, la productivité étant trop faible. Le robot de traite aiderait à multiplier le nombre de traites par jour, qui manuellement représentent un travail colossal pour un grand éleveur. Le passage à la robotisation permet aussi, en dégageant du temps, de mieux prendre soin des animaux. Cependant, un robot de traite coûtant 200 000 €, il est donc inaccessible pour les pays d’Afrique. Cela donne déjà une idée des écarts qui existent entre les différentes agricultures. »

Sylvie Brunel appelle à se souvenir que nous venons d’un monde de la faim.

« En France, il faut reposer la problématique dans le contexte d’après-guerre : rationnement, queues, malnutrition. En 1954, le verre de lait dans les écoles est imposé par Pierre Mendès-France soucieux de mesures de santé publique dans une France ayant souffert de rationnement et de carences. L’alimentation et la santé sont des préoccupations d’après-guerre, il faut aussi combattre l’alcoolisme par exemple. En Europe, la révolution de l’agriculture se fait par une motorisation et une mécanisation demandant des moyens qui seront fournis par le plan Marshall, aide colossale des Etats-Unis. Parallèlement, on procède au remembrement du petit parcellaire français extrêmement éparpillé pour permettre le fonctionnement des machines et on assiste ainsi à une unification des paysages, aujourd’hui vécue comme une destruction de la biodiversité. Ces évolutions ont reposé sur un pacte politique passé avec les agriculteurs pour qu’ils nourrissent la France mais elles ont aussi correspondu à des évolutions financières et techniques : le banquier et le technicien font leur entrée dans les fermes. Elles ont été une révolution des machines et de la génétique afin d’augmenter la productivité. La France se positionne en leader aujourd’hui de la génétique animale. En Equateur par exemple, des paysans andins à 4000 m d’altitude inséminent artificiellement avec de la semence française des prim’holstein qui viennent d’ailleurs de Nouvelle-Zélande. Il faut bien comprendre que la mondialisation de l’agriculture est en marche, et pas seulement en France.

Le chemin à parcourir est important, en 1969, la loi Godefroy impose une qualité bactériologique du lait. On oublie que dans les années 1960, il y avait 4000 décès par an en France dus aux intoxications alimentaires. Aujourd’hui les scandales alimentaires sont vécus comme véritablement inacceptables. La transparence, la traçabilité, l’exigence de qualité sont devenus la norme en France mais n’ont pas encore une réalité dans bien des pays du Sud.

Les coopératives se sont mises en place aussi après-guerre et aident les paysans à s’organiser car un paysan seul est un paysan spolié. La coopérative, anciennement appelée « la prospérité fermière », aujourd’hui « Ingrédia » procède au cracking du lait. Quand on est éleveur, on peut vendre son lait à des prix assez peu rémunérateurs, c’est tout le problème de ces éleveurs qui souffrent de la crise du lait. Dans ce contexte, trois quarts des agriculteurs travaillent en France avec des coopératives. Ici le craking du lait extrait les protéines laitières à très haute valeur ajoutée dans lesquelles on trouve des moyens de lutter contre le diabète, certaines formes de cancer, la dénutrition entre autres. Nous avons donc une agriculture française qui est dans une recherche permanente de se redonner de la valeur et de rester présente sur les marchés.

La révolution agronomique a par ailleurs concerné le maïs pour lequel il existait des variétés très différentes mais adaptées à des situations locales et avec des rendements assez faibles. EIles ne permettaient pas de faire face aux enjeux de la transition alimentaire, c’est-à-dire au passage d’une alimentaire plutôt végétale, à une alimentation plus riche en protéines animales. Le maïs, céréale souvent mal aimée, a commencé à être sélectionné en 7000 avant J.-C., depuis Christophe Colomb il s’est diffusé en Europe et dans le sud-ouest de la France où les agriculteurs étaient pauvres, le maïs leur permettant d’augmenter leur revenu. Après la seconde guerre mondiale, on constate l’arrivée d’hybrides venant des Etats-Unis. Les premiers n’étant pas adaptés à la demande française, l’INRA travaille à des hybrides français. Aujourd’hui, on a des maïs OGM qui suscitent beaucoup de protestations.

Ce qui interpelle sont, par exemple, les attaques contre le Monsanto BT d’il y a quelques années alors que, parallèlement, dans nos jardins on emploie actuellement le BT qui est recommandé et donné pour bio contre la pyrale du buis. Sans être un plaidoyer pour les OGM, il faut avoir conscience que parfois notre regard change autant que nos priorités. Aujourd’hui, on est extrêmement méfiant. Mais, l’agriculture dans les pays qui se nourrissent est celle qui a relevé le défi de productivité en économisant les surfaces, or la terre n’est pas extensible et nous voulons de plus en plus de superficies protégées. La conférence de Nagoya a décidé que 17% des terres émergées seraient protégées d’ici 2020. La France produit, sur 5 % de la surface agricole utile mondiale seulement, 20 % de la production européenne, est la première exportatrice de semences au monde, pèse directement ou indirectement 14 % des emplois en France, et occupe deux tiers des territoires. Elle est le troisième poste d’excédents de notre balance commerciale. Vaut-il mieux vendre du blé, du lait ou des armes ?

On ne parle pas suffisamment de cet effort que les agriculteurs font pour nous nourrir mais pour nourrir aussi d’autres pays.

Sur le long terme, l’espérance de vie a fortement augmenté (79 ans pour les hommes, 83 ans pour les femmes) du fait des progrès de la médecine mais aussi de l’alimentation. On oublie ce que nous devons à nos agriculteurs qui sont menacés par le gaspillage foncier, par l’expansion de l’urbain et du périurbain, espace de tensions foncières, sociales, paysagères aujourd’hui. On cultive par ailleurs une vision passéiste et bucolique de l’agriculture tant nous avons intégré cette facilité d’abondance. Les citadins ne connaissent plus la réalité du travail agricole, les savoir-faire, les connaissances et la technicité qu’il requiert. La population est devenue extrêmement exigeante, les médias sont en permanence en train d’attaquer l’agriculture. Récemment à propos du scandale des œufs au Fipronil, on a jeté l’opprobre sur la filière. De plus, la grande distribution contribue à l’entretien du mythe d’une agriculture ancienne et plus saine qu’elle illustre dans ses publicités (yaourts La Laitière). Entre agriculteurs et néo-ruraux, la cohabitation est parfois très difficile, les conflits d’usage nombreux et le rapport à la nature conflictuel.

Or, l’avenir de l’agriculture n’est-il pas celui d’une agriculture de plus en plus industrialisée, sans paysans ? Elle doit répondre à des normes extrêmement exigeantes : le cahier des charges de Lidlel est un des plus exigeants au monde. Elle devient une des agricultures des plus concentrée au monde : on perd la moitié des exploitations agricoles tous les 10 ans en France. On trouve encore, cependant, la présence des exploitations familiales avec une superficie moyenne de 80 ha, un troupeau moyen de 50 têtes. A contrario, la Russie par exemple, a des exploitations énormes de 400 000 ha, à ce propos les sanctions décidées au lendemain de l’invasion de la Crimée contre la Russie a mis en difficulté l’agriculture française car elle était fortement exportatrice de ses produits dans ce pays. Aujourd‘hui, la Russie devient un géant de l’agriculture. Il faut rappeler que le secteur agricole français est aussi soumis à la fluctuation des marchés et le ralentissement de la demande chinoise a pesé lourd. Aux États généraux de l’alimentation qui se tiennent maintenant, la FNSEA propose de montrer quel est le revenu de l’agriculteur sur une baguette de pain, une pomme, un litre de lait afin de rééquilibrer la reconnaissance et la rémunération des agriculteurs.

L’agriculture a pour enjeux de nourrir la France, mais aussi de contribuer à alimenter 10 milliards d’hommes bientôt, alors qu’elle reste objet de méfiance. Aujourd’hui le monde se « moyennise » et la classe moyenne demande une alimentation de qualité, plus riche en protéines animales, et en quantité, dans un processus de la transition alimentaire. La demande se porte aussi sur des produits plus faciles d’emploi. La classe moyenne chinoise dépasse en nombre la classe moyenne américaine. Les émergents sont donc en attente et très tournés vers les produits français qui bénéficient d’une sorte de marque « France » dans le monde, critère de qualité reconnu.

2,5 milliards d’Africains vont de plus en plus en ville où les prix de la nourriture conditionnent la paix sociale. Les émergents sont très en demande sur l’équilibre alimentaire. Le lait montre un ensemble de pays déficitaires alors que nous sommes excédentaires. La chine investit en Bretagne pour produire des laits infantiles de qualité par exemple. Les enjeux fonciers sont forts, la terre devient un bien stratégique. Les Chinois, la Corée-du-Sud, le Japon, l’Arabie Saoudite, les Émirats Arabes Unis (au Soudan pour ces derniers) délocalisent leur sécurité alimentaire et achètent des terres.
Les traitements des plantes sont également un pôle essentiel pour ces pays. Ils achètent des filières qui les produisent car sont dans la même problématique que nous après la Seconde Guerre Mondiale. L’évolution du défi alimentaire montre qu’en 1960, on était 3,3 milliards de personnes sur terre et on produisait un milliard de tonnes de céréales, aujourd’hui on est 7,3 milliards et on produit 2,4 milliards de tonnes de céréales, demain pour 10 milliards d’individus, il faudra 3,4 milliards de céréales, ceci dans un contexte de changement climatique, de perte de terres arables.

Bien sûr la faim régresse mais des régions sont structurellement déficitaires, les importations sont déjà colossales, le déficit céréalier existe pour tous les pays émergents. Les déficits en céréales à l’horizon 2030 sont très importants au Moyen Orient, en Afrique, dans l’Asie de l’Est, le Pacifique. Il y a des attentes croissantes de l’Afrique du Nord, 1/5 ha de blé français se dirige vers le Maghreb.

Ce contexte est un contexte de tensions alors même que le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) alerte sur le changement climatique qui menace la production mondiale. La productivité va baisser dans certaines régions et le défi de l’atténuation et de l’adaptation des territoires se pose. En 2030, la température de Paris sera celle de Bordeaux actuellement. Les pays des basses latitudes seront les plus impactés. On attend une « océanisation, aquitainisation, méditerranéeisation » du territoire français. Cela signifie plus de parasites aussi. Les impacts sont réels, en 2016, 40 % du blé a du être déclassé en blé fourrager, perte dure qui relativise la vision que l’on a des gros céréaliers qu’il faut d’ailleurs cesser d’opposer aux petits agriculteurs. La France se positionne parallèlement comme leader dans les réponses au changement climatique.
D’autre part, la question de l’eau est à poser : comment gérer l’irrégularité des apports en eau, le fait qu’elle soit mal répartie ? L’eau « qui nourrit », c’est 17 % des terres et 40 % de la production mondiale. La réponse à l’explosion démographique depuis les années 1950 s’est faite par le miracle de l’irrigation. La production a été multipliée par trois sur une surface qui a augmenté de 13 %. L’enjeu est de faire des réservoirs d’eau en France mais il s’oppose à un refus des populations. Or, la Champagne, très grande terre agricole, était auparavant une Champagne Pouilleuse ou Crayeuse avant l’ennoiement de 6000ha devenus le lac du Der par exemple.

Aujourd’hui, la demande faite aux agriculteurs est de nourrir le monde et de sauver la planète, ce qui paraît paradoxal.

La filière subit des agressions et se trouve dans une profonde crise morale. Or, dans les pays sud, un tiers des récoltes se perdent si on ne les protège pas contre les parasites. Rappelons en France les ravageurs qui attaquent la vigne aujourd’hui, au XIXe siècle le phylloxéra qui oblige à ennoyer la vigne, à importer des plans américains, ou en 1951, le scandale sanitaire de Pont-Saint-Esprit, céréales contaminées par des mycotoxines. La solution d’hier est donc devenue le problème d’aujourd’hui. Les demandes sont extrêmement exigeantes, les organisations environnementales sont extrêmement virulentes sur des accusations d’empoisonnement par les produits chimiques divers. Cependant, l’utilisation des produits phytosanitaires est soumise à des protocoles, les agriculteurs eux-mêmes sont sensibles à leur utilisation car sont les premiers exposés. On constate d’ailleurs, que même si certaines pathologies apparaissent dans la profession, leur espérance de vie est plutôt supérieure à la moyenne. Dans le Limousin, on met en place des chartes de bon voisinage lorsque le rural et l’urbain sont proches pour ce qui concerne les traitements.

Au-delà de ce regard souvent un peu schématique quelle solution durable peut-on apporter à cette nécessité de protéger nos récoltes?

Veut-on revenir à la pénibilité d’hier ? Les deux mois et demi de vacances d’été se justifiait par la nécessité du travail à la ferme des enfants. On reste avec une impression que les produits du passé étaient meilleurs or, la toxicité de ses produits était très importante (bouillie bordelaise). La chimie d’aujourd’hui permet de travailler pour le traitement, sur des produits ciblés avec des doses moins importantes, d’éviter la fréquence des utilisations avec des produits moins lessivables. Aujourd’hui, la tendance de la grande et moyenne distribution est de présenter le bio comme la seule alternative mais cette incitation au bio est plutôt celle d’une grande distribution qui en retire plus de marges. La L’agriculture, la culture bio dans le monde équivaut aussi au travail des femmes et au travail des enfants. Elle n’est pas soumise à la même qualité sanitaire ou environnementale et encourage les risques de contamination fongique, plus importants que dans le conventionnel. La crainte est donc celle d’une forte concurrence avec les agriculteurs bio français, du risque d’être asphyxié comme les agricultures conventionnelles l’ont été dans une guerre des prix, le prix restant un élément essentiel pour les consommateurs pauvres.

Ainsi l’agriculture aujourd’hui est engagée dans une transition agro-écologique et il faut faire confiance au professionnalisme, à la technicité, à la responsabilité de nos agriculteurs. Ils souhaitent que leur biodiversité soit nourricière et améliorée, comme le montre l’objet de mon livre Croquer la pomme. Il faut donc arrêter d’accuser l’agriculture française d’utiliser le plus de produits phytosanitaires au monde, c’est faux, la France est au 9ème rang européen pour leur utilisation. Les agriculteurs se sentent responsables et les produits phytosanitaires leur coûtent de plus en plus cher. Autour du Glyphosate, assimilé souvent à Monsanto, alors que celui-ci appartient au domaine public depuis les années depuis 2000, se cristallisent les attaques alors que d’autres produits sont également cancérogènes: la pilule, la viande au barbecue, l’aspirine, le saucisson, le café le sont de manière avérée. Or, ces attaques permettent à Monsanto de travailler sur d’autres molécules qui seront présentées demain comme beaucoup plus vertueuses. Il faut alors s’interroger en permanence sur les objectifs de ces levées de bouclier.

L’histoire de l’agriculture est d’avoir cherché à éliminer les risques. Les agriculteurs français sont en attente de nouvelles propositions. L’enjeu essentiel est la santé végétale, les réponses doivent être multiples : le bio-contrôle, les nouvelles herbes ou plantes sélectionnées par le génie génétique plus à même de répondre au changement climatique, les produits de santé des plantes.

Il faut donc répondre aux nouvelles menaces en innovant. Il existe une très grande diversité d’outils et de machines qui permettent des résultats très performants en terme d’agriculture de précision : stations météo, capteurs, calibrage optique des pommes (par exemple par la société Maf Roda de Montauban), robots défricheurs, protections anti-grêle qui sont des moyens propres à l’instar de la tomate de serre, production propre. La technique de la culture simplifiée, c’est-à-dire sans labour à qui on reproche de retourner profondément la terre, d’émettre du CO2, de détruire la structure des sols est mise en avant. Cependant, au bout de deux ou trois ans on a un retour des mauvaises herbes, donc il faut gratter la terre pour s’en débarrasser ou semer puis épandre du glyphosate. Les agriculteurs doivent ici apporter des réponses car ils savent que la société condamne ces produits.
Parallèlement, ils doivent relever les défis de la durabilité mais sont aussi les premiers artisans des paysages et rendent des services éco systémiques à travers l’entretien, l’extension des haies par exemple permettant à la terre de capter le CO2 . Ils sont donc en demande de soutien et de solution.
Le sujet des produits bio-sourcés : énergie renouvelable, non polluante, bio carburants, bio gaz, méthanisation sollicite une économie circulaire. En Bretagne, au-delà de l’image négative, il faut s’intéresser aux tentatives de valorisation du lisier.

Cependant, malgré tous ces enjeux, la première mission des agriculteurs reste toujours la sécurité alimentaire. On ne peut pas opposer les modèles d’agriculture, toutes les agricultures étant nécessaires pour répondre à ce défi. La France, pays des terroirs, de micro-régions, offre des réponses toutes différentes. L’obligation est qu’une agriculture de précision soit aussi une agriculture de pays, qui puisse être la plus proche possible des conditions pédologiques, du marché. Il faut une mise en valeur fine des territoires.

Les circuits courts sont une bonne chose mais si la Bretagne passait au circuit court , elle n’utiliserait que 6% de sa production. Le bio est une bonne chose mais souvent offre moins de rendements et plus de coût de main d’œuvre.

Donc il faut une agriculture durable qui permette d’enrichir les territoires et les agriculteurs, d’assurer la pérennité, la transmission des exploitations (aujourd’hui 2/5 des exploitations ne retrouvent pas de repreneurs). Il faut ainsi accompagner et soutenir l’agriculture. La chance du modèle français est qu’on garde une agriculture familiale qui a besoin des 10 « P » essentiels : Paix, Précipitations, Plantes, Pratique, Protection, sécurisation foncière, Prix, Pacte agricole qui a besoin d’être refonder…

Le secteur reste stratégique, c’est pourquoi il doit faire l’objet d’une mobilisation politique et d’un fort interventionnisme qui est à l’œuvre dans tous les pays désireux de sauver leur agriculture : Etats-Unis, Japon, Corée du Sud, Chine…

Le changement de regard sur l’agriculture passe d’abord par le respect, la reconnaissance, la rémunération et la rencontre des agriculteurs.

Sylvie Brunel s’est faite l’avocate des agriculteurs français et a séduit par sa force de conviction un auditoire convaincu.

Par Carole Saidane