En parcourant les rues de la cité biterroise avec mes camarades clionautes c’est le même enchantement que lors de ma première venue dans la plus vieille cité de France hexagonale, lors du forum national de l’association en 2016, qui me revint.

Depuis lors quelques années et visites ont passé. Pour autant il reste toujours tant à découvrir. C’est le sentiment qui fut le mien lorsque je découvris au détour du cimetière vieux de la ville les sculptures de Jean Magrou. Si le nom d’Injalbert est connu bien au delà des terres languedociennes, artiste émérite sur lequel une collègue consacrera une publication, le nom de son élève est bien moins connu. Pourtant il apparait nécessaire de combler cette méconnaissance et faire justice si l’on peut dire, à la vie de cet artiste biterrois dont les travaux recèlent des trésors qui s’offriront aux yeux attentifs et déterminés des visiteurs de Béziers et d’ailleurs. 

Jean Magrou, un parcours méconnu

De Jean Magrou aucune photographie n’est disponible sur internet. Pour autant son parcours est bien connu. Né dans la cité biterroise en 1869, Jean Magrou est issu d’une famille d’artistes (son père est lithographe). Élève au lycée Henri IV, celui-ci se tourne rapidement vers la voie artistique en s’inscrivant aux Beaux-Arts de Paris. Arrivé dans la capitale, il y retrouve son compatriote biterrois Injalbert et en deviendra l’élève fidèle. Rapidement repéré pour son grand talent, récompensé de multiples fois (Second Prix de Rome en 1897, il renonce finalement à son séjour dans la ville Médicis à la suite de son mariage), Magrou poursuit une carrière émérite et devient à son tour enseignant à la Sorbonne, plus spécifiquement professeur de modelage et de dessin. 

Au cours de sa carrière Jean Magrou participe aux initiatives et innovations pédagogiques de son temps. Il est ainsi l’un des professeurs de la coopérative enseignante fondée en 1907 par Marie Curie. Expérience éphémère et méconnue de la vie de la grande scientifique.

Reconnu par ses pairs, Magrou l’est aussi de l’Etat et des collectivités. En témoignent les nombreuses commandes passées par l’État, notamment au moment du jubilé de Pasteur en 1892 Une grande cérémonie sera organisée en l’honneur du scientifique jurassien dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne et immortalisée par l’oncle par alliance de Jean Magrou, le peintre Jean-André Rixens ou encore le monument au génie latin, inauguré en 1921 dans les jardins du Palais Royal et déplacé à Béziers en 1992.

Tableau du jubilé de Pasteur réalisé par l’oncle par alliance de Jean Magrou, Jean-André Rixens
Monument au génie latin, photographie de 1921 dans les jardins du Palais Royal.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Jean Magrou réalise également nombre de monuments aux morts, notamment dans les villes du sud de la France. Citons à cet effet le monument de Servian ou encore de Fumel. 

Monument aux morts de Servian, œuvre de Jean Magrou
Monument aux morts de Fumel, oeuvre de Jean Magrou

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Jean Magrou poursuivra sa carrière artistique dans toute la France et même au delà (réalisation du gisant du tombeau de l’empereur brésilien Pedro II) jusqu’à son décès en 1945. 

Gisant de l’empereur Pedro II, oeuvre de Jean Magrou

 

IJean Magrou, un héritage bien présent à Béziers

Si la vie de Jean Magrou est largement inconnue en dehors des cercles d’amateurs et des fins connaisseurs de l’histoire biterroise, son héritage reste bien présent dans l’espace de la cité qui la vu naitre. En effet Jean Magrou est resté fortement attaché à sa ville, malgré son exil parisien. Ainsi il réalise pour son ancien lycée, Henri IV, le monument des anciens élèves toujours bien visible dans la cour intérieure de l’établissement (photo monument Henri IV). 

Monument des anciens élèves du lycée Henri IV, oeuvre de Jean Magrou

Artiste éclectique, Jean Magrou travailla de nombreux matériaux et usa de nombreuses techniques. Les fruits de ces travaux sont pour beaucoup disponibles au musée Fayet de Béziers. L’on peut y admirer quelques unes de ses plus belles œuvres en terre cuite notamment. Citons à cet effet le buste de son fils Pierre Magrou, une piéta, et une lionne portant sur son dos trois enfants.

Buste de Pierre Magrou, oeuvre de Jean Magrou
Pieta, oeuvre de Jean Magrou

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Lionne portant trois enfants sur le dos, oeuvre de Jean Magrou

 

De manière totalement subjective et assumée, je trouve que l’œuvre la plus emblématique du travail de l’artiste se trouve dans un lieu reculé de la cité, que peu connaissent et arpentent : le cimetière vieux de la ville de Béziers. Au milieu de ses allées se dressent des sculptures d’Injalbert et Margrou. Ce dernier réalise notamment la tombe de Paul et Madeleine Pancol, d’inspiration orientale. Cette sépulture, représentant les piliers d’un temple de l’Egypte antique, est surmontée d’un bas relief en bronze aux motifs et personnages de profil. 

 

 

 

 

 

 

C’est ici également que l’artiste est enterré, dans une tombe bien simple et peu ornée. Paradoxe pour un artiste aux œuvres si riches et qui marquent, sans que nous nous en doutions, l’espace de son pays biterrois. 

Tombe de Jean Magrou, cimetière vieux de Béziers

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