Ancien co-président du FIG et heureux retraité de l’université de Perpignan, Bertrand Lemartinel a offert sur cette fin de matinée une riche séance photographique à ses auditeurs dans le but de montrer que la géographie s’était fortement concentrée sur les espaces centraux en les modélisant fortement, parfois au point d’en devenir réductrice, voire fausse et qu’il était temps de intéresser aux marges et aux franges.

La première partie s’est interrogée sur la diversité des lieux frangeants, les marges de écoumène : les montagnes, les déserts, les lieux à risques…mais aussi les marges sociales qui ne sont pas forcément périphériques mais pouvant être centrales à l’image du quartier gitan de Perpignan qui compte une très grande part de locataires.

La deuxième question était celle de savoir ce qu’il y avait comme différence entre habiter et occuper. Les sédentaires peuvent être peu occupants, peu habitants, parfois, on ne « tient » pas longtemps dans un lieu difficile. Les nomades peuvent finalement se révéler bien plus habitants. Le cas des « gens du voyage » interpelle également.

Est-on davantage habitant si sa condition sociale est meilleure ? Pas forcément. Des marges centrales favorisées existent, en plein Paris par exemple où la cartographie du nombre d’enfants par famille montre qu’ils sont très faibles dans les arrondissements de l’hyper-centre. En revanche, à Clichy sous Bois par exemple, ou dans d’autres quartiers pauvres, on territorialise davantage. Il n’est pas rare non plus de voir des vieux centres villes se délabrer alors que le taux de propriétaire est pourtant très élevé.

Dans un troisième temps, Bertrand Lemartinel a choisi de montrer que les évolutions de ces phénomènes étaient très rapides. Le facteur temps joue énormément. Des tentatives d’habiter peuvent avorter à l’image des exploitations dont les habitants ne tiennent pas le choc de la rudesse des conditions de vie.

Le cas du bidonville est intéressant, celui de Nanterre par exemple. Les habitants du quartier de la folie sont restés sur place, en changeant de logement certes, mais sont restés sur place.

Le cas des personnes âgées est aussi amusant, lorsque l’on constate qu’une municipalité améliore les conditions de vie de ses habitants…en investissant dans les cimetières !

Dubai, ni habité, ni occupé est encore un cas à part, de la construction spéculative pure et simple.

Enfin, dans un quatrième et dernier temps, Bertrand Lemartinel parle de dynamiques violentes en rappelant que la Terre est un lieu social mais qu’elle a bien des caractéristiques biophysiques puissantes et qu’elle peut le rappeler dans certaines parties de son étendue.

Des villages se sont vus intégralement déplacés suite à des catastrophes naturelles.

On instrumentalise la nature également : cas des agriculteurs d’Afrique centrale qui sont déloger des zones forestières pour les protéger, ce qui les obligent à avoir un impact écologique plus fort en cultivant dans de plus mauvaises conditions ailleurs.

Une archéogéographie de l’habiter s’installe pour légitimer une certaine antériorité et rester « là ». Cela n’évite pas la surenchère à l’image des conflits entre Israël et Palestine. La réécriture des lieux est permanente et cela se sent particulièrement dans les régimes autoritaires.