Laurent Joffrin nous livre ici la conférence d’un passionné, d’un curieux. Il retrace son propre parcours à la recherche de l’Invisible Armada, marine espagnole défaite durant l’été 1588 par les Anglais. Son propos est rempli d’anecdotes que le lecteur de son ouvrage déjà paru retrouvera certainement avec plaisir. Celles-ci nous permettent de mieux comprendre le contexte maritime et géopolitique  de l’époque.

Après la publication des 95 thèses de Luther, l’Europe est divisée. Les catholiques, représentés par l’Espagne, puissance dominant le Portugal, le nord de l’Italie, le Saint Empire, la Hollande et les colonies outre-mer, craignent l’avancée du protestantisme, notamment en Flandre. Cette région, forte de marins expérimentés, se rapproche de l’Angleterre. L’Espagne de Philippe II se donne alors pour objectif d’envahir le royaume d’Elisabeth Ière. Une flotte immense remonte en direction de la Hollande afin de récupérer les soldats en attente dans le nord de l’Europe. A Calais, les Français choisissent de rester neutres. D’autres échecs suivent, l’Armada ne trouve pas de port pour embarquer ses soldats. Le capitaine décide de mouiller au large de Gravelines. Les navires sont alors attaqués par les Anglais.

Les Espagnols finissent par envisager le chemin du retour. Toutefois, ils sont bloqués par leurs adversaires. Le seul moyen trouvé est de faire le tour des îles anglaises. L’Armada essuie une tempête au nord de l’Ecosse. L’automne 1588 est réputé pour son mauvais temps. Les hommes meurent par manque de ravitaillement. Ces pertes sont estimées au tiers de la flotte espagnole. L’Invinsible Armada, ironiquement nommée ainsi par les Anglais, se délite.

Laurent Joffrin, à bord de son bateau, raconte les évènements historiques à son équipage. Vient l’idée du livre, l’occasion de faire alors le récit de son parcours. On apprend ainsi qu’en explorant le site de la bataille de Gravelines, le vent et les courants sont forts, prêts à faire déraper l’encre et donc faire échouer les navires. Il n’y a aucune protection, aucun banc de sable pour les flottes alignées. Cependant, les Anglais ont le vent pour eux et peuvent donc attaquer. Les Espagnols et leurs voiles carrées ne peuvent qu’être défenseurs, ne pouvant prendre les vents contraires. Les Anglais envoient des embarcations enflammées poussées par Eole, c’est la panique chez les Ibériques dont le moral baisse.

Le parcours du journaliste permet aussi de s’étonner des techniques de l’époque. Il regrette ainsi de s’être laissé piégé par des bancs de sable alors qu’il regagnait Dunkerque, au contraire des Espagnols du XVIe siècle. De quoi souligner le travail important des pilotes de l’époque. Ceux-ci devaient notamment faire attention à ne pas se laisser piéger par les feux des naufrageurs pris pour les lumières de phares.

C’est ainsi que le propos dérive vers les petites histoires des lieux croisés. A Plymouth, le premier phare sur les récifs d’Eddystone, a été érigé par Henry Winstanley, peintre et ingénieur. Pris par une tempête alors qu’il effectuait des réparations, il disparait avec son œuvre. Victor Hugo se serait inspiré d’une gravure du phare pour L’Homme qui rit.

On se délecte ensuite des histoires d’eau croupie sur les navires, considérée comme bonne pour la santé. Les marins reprenaient le fond restant et le déversaient dans les nouveaux barils.

La conférence prend fin sur les diverses techniques imaginées pour calculer les longitudes. En effet, les horloges ont tendance à se décaler à l’époque. Il a ainsi été proposé d’utiliser deux groupes de chiens. L’un reste à terre, l’autre est embarqué. Grâce à une poudre qui reproduit la douleur, il est possible, à heure convenue, de faire aboyer le groupe en mer en poignardant les autres chiens. Il ne reste plus qu’à calculer le décalage horaire. Projet rejeté…