Quel est le rôle politique du conseiller à l’Élysée ? Bernard Poignant nous donne une réponse. L’homme, agrégé d’histoire, a été premier secrétaire du Parti socialiste dans le Finistère, membre du Bureau Exécutif en 1981, député de 1981 à 1986 et de 1988 à 1993 et maire de Quimper de 2008 à 2014. Surtout, il a été conseiller « amical » de François Hollande à l’Elysée de 2012 à 2017. Il vient de verser ses archives personnelles au Cevipof et à Sciences Po. Cela explique la présence de l’archiviste Odile Gaultier Voituriez, du chercheur Mathieu Fulla et du directeur de Sciences Po, Marc Lazar.

Marc Lazar nous précise que Nicolas Sarkozy avait 70 conseillers et François Hollande 50. Parmi ces derniers, Jean Paul Jouyet était le secrétaire général et Sylvie Hubac la directrice de Cabinet. Le secrétaire général adjoint s’appelait Emmanuel Macron…

L’organisateur des dîners à l’Elysée

Une des principales tâches de Bernard Poignant a été d’organiser 120 déjeuners et dîners à l’Elysée, de 8 et 10 personnes. L’objectif était d’empêcher que le Président soit dans sa « Tour d’Ivoire » et qu’il garde le contact avec le peuple français. Pour l’essentiel, les invités étaient des députés et sénateurs non médiatiques, des représentants d’associations, des maires et des chefs d’entreprise principalement.

Son autre mission a été de travailler avec ceux qui préparent les discours présidentiels, même si François Hollande retouchait toujours ses discours …même pour les remises de légion d’honneur.

Qu’y a-t-il dans ses archives ?

Odile Gaultier Voituriez archiviste en chef précise qu’il y a neuf cartons d’archives d’un mètre linéaire, comptant 20 cahiers chronologiques. Ces archives couvrent aussi les périodes Michel Rocard de 1988 à 1991 et Lionel Jospin de 1997 à 2002. Pour l’Elysée, de 2012 à 2017, il y a des comptes-rendus de réunions, des notes d’actualité et des notes d’ambiance.

Certains tweets ou conversations téléphoniques sont aussi retranscrites.

Depuis le Fonds Mécheri sous Vincent Auriol de 1954 à 1958 (IVème République), c’est le fonds d’archives le plus important sur la gouvernance de la Vème République. C’est un fonds cohérent et dense, remis en 2019.

 

Mathieu Fulla qui a travaillé sur les Archives de Bernard Poignant précise

Les 5 points essentiels…

1/ Bernard Poignant a été l’intermédiaire de François Hollande avec la société. Il donne trois exemples : François Bayrou, Frigide Barjot et le directeur de l’Humanité, au bord du dépôt de bilan…

2/ Bernard  Poignant a animé un « réseau breton » avec entre autres Vincent Bolloré.

3/ Bernard Poignant a eu une complicité très forte avec Jean Pierre Jouyet, ce qui lui facilitait sa tâche de conseiller à l’Elysée.

4/ Il a essayé de jouer un rôle dans la réforme territoriale de 2015 et dans la fusion avortée Bretagne/Pays de la Loire.

5/ Il a soutenu et cru à la candidature Hollande jusque novembre 2016.

Une auto célébration ?

Le problème de cette table ronde, c’est qu’elle a vite tourné à l’éloge de Bernard Poignant par Bernard Poignant et par TOUS les conférenciers ! C’est donc presque gênant d’assister à cet exercice hagiographique. Quelques points sont intéressants: mais d’autres relèvent d’anecdotes peu pertinentes comme la rencontre avec le descendant des Bourbons.

Je suis donc sorti de cette table ronde embarrassé et contrarié. Le narcissisme des hommes politiques et de leurs « faire valoir » est sans bornes. Conseiller à l’Elysée, c’est vraiment la « France d’en haut », la Cour et ses us et coutumes; mais bien moins passionnants que chez Saint-Simon….

Vous pouvez consulter les autres comptes-rendus de conférence de Blois 2020.

Si vous vous intéressez à l’incarnation du pouvoir dans notre vieille république, ce compte-rendu de lecture d’un ouvrage de Jean Garrigues est pour vous.