Avec :
– Marion Beillard, IA-IPR, académie de Versailles,
– Yann Calbérac, maître de conférences à l’université de Reims,
– Bertrand Pléven, PRAG à l’ESPE Paris, doctorant.

Structuré autour de trois grands exemples, cet atelier avait pour but de montrer comment il est possible de s’emparer d’extraits de films pour bâtir des séances d’apprentissage en géographie sur le thème central de l’habiter.

Après quelques clarifications sur le concept (l’idée qu’habiter signifie résider, circuler, cohabiter ; l’idée que le terrain joue un rôle central pour donner à voir le monde et le faire rentrer dans la classe ; l’idée que le discours cinématographique est à déconstruire), le ton est donné : l’auditoire doit se placer non pas en simple spectateur mais en « spectateur géographe » pour identifier, localiser, analyser le contenus des extraits proposés.

Pour expliquer la démarche, un extrait de la série « Shameless » est introduit : le personnage principal, Frank Gallagher, quelque peu alcoolisé dans un bar de Chicago, explique à sa façon la gentrification et s’improvise « géographe de comptoir ». Ici, l’espace n’est donc pas un décor mais devient la matière première d’une analyse pouvant s’utiliser en classe de seconde.

Le premier exemple filmique prend appui sur le film « L’année suivante » de Isabelle Czajka, paru en 2005. Il est question d’une jeune fille qui se déplace d’un décor a priori rural (arbres, cueillette, bruits d’oiseau) vers un point de contemplation de l’agglomération parisienne. En creux, le périurbain est montré avec ses clichés. De quoi nourrir le thème « habiter la métropole » de la classe de 6ème.

Le public est invité à proposer des pistes d’usages en classe. Sont évoqués : le passage des images sans le son, la nécessité de passer le film une seconde fois, la transitionnalité de l’espace qui n’est pas sans rappeler la transitionnalité corporelle de la fille adolescente. Le film apporte une nette plus-value sur l’image fixe parfois trompeuse puisqu’ici, le parcours montre qu’il s’agit d’un même endroit (début plutôt vert et fin urbaine).

Le second extrait mobilise un film plus connu, « Lost in translation » de Sophia Coppola, paru en 2004. Idéal pour traiter de « l’urbanisation et la mondialisation » en 4ème, l’extrait retenu porte sur le début du film, lorsque Bob (Bill Murray) arrive en pleine nuit dans les rues bondées de Tokyo.

La discussion s’engage sur le côté possiblement réducteur de ne prélever qu’un seul extrait du film, sur les liens entre l’ici et l’ailleurs (le fax reçu de sa famille), sur la musique qui couvre volontairement les bruits de la ville…

Un dernier extrait, tiré du film « Wassup Rockers » de Larry Clark paru en 2005 montre comment traiter du thème « l’Amérique, entre tension et intégration » au programme en Terminale. Il est ici question de cohabitation à plusieurs échelles. Une bande de skaters latinos se cherche un spot à Los Angeles et atterrissent devant le bureau de délivrance des permis de séjour (ironiquement, le réalisateur s’était vu refuser de tourner cette scène devant la Beverly Hills High School). Les skaters sont interpellés par un shérif qui questionne leur légitimité à se trouver dans ce quartier n’étant pas le leur.

Ici, c’est la cartographie qui se prête à l’exercice, elle convoque les frontières et les « murs invisibles » pour reprendre l’expression de Guy Di Méo :
– De manière proche, le parking où se trouve le policier constrate avec le mur où sont alignés les skaters,
– En s’éloignant, on remarque la coupure beaux quartiers/ghetto,
– A niveau international, il est question de l’opposition entre les Etats-Unis et les pays d’origine des skaters (Guatémala, Salvador, Mexique…).

La conclusion rappelle que le rythme de sortie des films est très rapide et qu’il n’est pas toujours aisé de faire son choix et que les enjeux intellectuels de l’apprentissage de l’image sont très importants : apprendre à voir mais voir pour apprendre.

A noter la précision apportée dans cet atelier sur l’usage des films et séries en classe :
– si l’œuvre est acheté en DVD avec licence, il n’y a de restriction particulière,
– dans le cas contraire, le droit de citation s’impose et il ne faut pas excéder un extrait de 6 minutes et 1/10ème du total de l’œuvre.